Discours du Premier ministre à Solvay (Haut-Rhin) sur l’emploi

Madame la ministre, chère Myriam El KHOMRI,
Monsieur le ministre, cher Emmanuel MACRON,
Monsieur le président de la Région Alsace Champagne-Ardenne Lorraine, cher Philippe RICHERT,
Mesdames, messieurs les parlementaires,
Messieurs les préfets,
Monsieur le président du Conseil départemental,
Madame la maire de Chalampé,
Monsieur le maire de Mulhouse,
Mesdames, messieurs les élus,
Monsieur le président directeur général,
Monsieur le directeur,
Mesdames, messieurs,
 
Merci à toutes et à tous pour votre accueil sur ce site, et je veux saluer les salariés qui sont ici présents, ainsi que l’ensemble des partenaires sociaux.
 
La visite que nous venons d’effectuer – avant de nous rendre sur un site de Pôle emploi à Mulhouse, dans le quartier Drouot, puis de visiter une entreprise, une PME, à Cernay – nous a permis de voir une salle de commandes qui bourdonne d’activité, des installations extrêmement innovantes, qui voisinent avec des machines plus anciennes – les deux sont utiles –, des procédés d’une grande performance parce qu’ils sont d’une grande précision. Et nous avons pu voir aussi à quel point Solvay est attentif à la sécurité de ses salariés et de ses installations, sur ce site classé Seveso.
 
Nous avons pu parler rapidement à quelques-uns des 1 000 salariés de cette entreprise. Nous connaissons leur professionnalisme et leur goût du travail bien fait, leur fierté de travailler pour un fleuron de l’industrie européenne – c’est un plus, une jeune apprentie nous le disait –,  pour cette usine qui fonctionne, vous nous l’avez rappelé à plusieurs reprises, nuit et jour, sept jours sur sept. Fierté de fabriquer des produits d’un haut niveau de qualité, qui rentrent dans la composition de nombreux objets du quotidien, du textile aux chaussures en passant par les airbags ou les pneus, et qui s’exportent partout dans le monde.

Nous avons pu voir, enfin, à quel point Solvay prépare dès aujourd’hui l’industrie de demain, en tirant partie de toutes les possibilités du numérique – de cette révolution du numérique. Et je voudrais saluer toute l’inventivité du projet « MIRe », cette usine virtuelle, ce « jumeau numérique » qui permet de simuler tous les cas de figure pour former les salariés, optimiser les processus et la maintenance.
 
Le rôle de l’Etat, le rôle du gouvernement, le rôle des ministres, c’est d’accompagner ces initiatives ; de s’appuyer sur l’histoire, les traditions, les savoir-faire industriels français, particulièrement riches dans cette région, tout en orientant notre industrie vers l’innovation et tout en orientant les salariés vers cette innovation. Car face à une concurrence toujours plus forte – et de l’autre côté de la frontière ! Elle se joue là, cette concurrence ! – la France et l’Europe doivent être à la pointe.
 
C’est pour cela que nous soutenons la recherche et le développement. Pour cela que le président de la République a lancé le projet « industrie du futur », dans le cadre de la « nouvelle France industrielle ». L’Etat apporte ainsi aux entreprises les moyens nécessaires pour qu’elles investissent, mettent le numérique au cœur de leur modèle d’exploitation – en un mot, modernisent réellement leur outil industriel.
 
Plus de 1 200 entreprises bénéficient déjà – grâce au programme d’investissements d’avenir, à bpifrance, à l’action des régions – de dispositifs d’accompagnement, et à la fin de l’année, elles seront 2 000.
 
Notre objectif est bien de rendre notre industrie plus compétitive – car c’est cela, le défi pour la France : faire en sorte que notre économie et notre industrie soient plus compétitives. Le rapport GALLOIS, à la fin 2012, avait bien souligné ce point-là : le retard principal – au-delà des questions de taille d’entreprises ou de formation de nos salariés, que je n’oublie pas – c’était ce retard en matière de compétitivité. Rendre notre industrie plus compétitive, donc, pour que les carnets de commandes se remplissent, pour que les entreprises puissent s’étendre, exporter, pour qu’elles puissent embaucher.
 
L’emploi, c’est la priorité de mon gouvernement – avec Myriam EL KHOMRI, Emmanuel MACRON, ici présents, et bien sûr avec l’ensemble des ministres. Et nos responsabilités, avec les acteurs économiques, avec les partenaires sociaux, c’est de tout mettre en œuvre pour combattre le chômage de masse qui s’est installé dans notre pays depuis plus de 30 ans. Et au fond, parce que c’est ce qui manque à la France, de redonner foi en l’avenir et d’avoir davantage confiance.
 
Agir pour l’emploi, c’était en premier lieu – vous l’avez rappelé, monsieur le président – restaurer la compétitivité de nos entreprises. Le Pacte de responsabilité et de solidarité permet plus de 40 milliards d’euros de baisse du coût du travail et de la fiscalité. Et je veux saluer l’engagement de la branche chimie, et notamment votre engagement pour la qualité – vous l’avez souligné – de la main-d’œuvre.
 
Il fallait également identifier et lever méthodiquement tous les blocages qui entravent la croissance ; parce que sans croissance, il n’y a pas de création d’emplois. 1,1 % de croissance pour 2015 pour notre pays, c’est bien … mais c’est insuffisant. L’objectif que nous devons atteindre en 2016 est de 1,5 %, parce que nous savons que c’est le seuil qui permet la création d’emplois. Simplifier, aussi, encourager l’initiative et l’esprit d’entreprise, qui existe dans notre pays, mais qui n’est pas suffisamment reconnu : c’était l’objectif de la loi Croissance, portée par Emmanuel MACRON, loi qui est aujourd’hui quasiment mise en œuvre dans tous ses aspects – en tout cas, dans quelques semaines, ce sera le cas.
 
Et aujourd’hui, pour la premières fois depuis la crise de 2011, les entreprises créent à nouveau de l’emploi en France : 47 000 en 2015, même si c’est encore insuffisant, parce que nous avons une démographie positive, c’est-à-dire que nous avons plus de jeunes que dans d’autres pays qui rentrent sur le marché du travail.
 
En 2016, nous voulons agir pour créer plus d’emplois, avec trois chantiers importants.
 
D’abord, le plan d’urgence, lancé le mois dernier. Le président de la République a annoncé que nous allions transformer le CICE – le Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi, que vous avez utilisé ici dans cette entreprise – en allégement direct de charges.
 
Ce chantier prendra du temps. Mais sans attendre, nous avons décidé de poursuivre la baisse du coût du travail, avec une aide de 2 000 euros par an aux PME qui embauchent – aide qui d’ailleurs peut s’ajouter à ce que les régions ont également engagé. Ce qui veut dire, pour ce qui concerne l’Etat, un remboursement de 100 % des cotisations patronales pendant 2 ans. Plus de 22 000 demandes d’aide – dont l’entreprise Protechnic que nous irons visiter tout à l’heure – ont ainsi été déposées en moins d’un mois. C’est un encouragement à poursuivre ; et demain, le gouvernement lance une campagne très importante sur cette question de l’embauche, sur tous les médias et Internet.
 
Ce plan d’urgence, porté avec beaucoup de volontarisme par Myriam El KHOMRI, permettra également de doubler, en 2016, le nombre de formations pour les demandeurs d’emploi, avec 500 000 formations supplémentaires. Nous pallions ainsi une des faiblesses de notre marché du travail : en France, seuls 10 % des chômeurs sont aujourd’hui formés, alors même que certains secteurs – c’est vrai dans l’industrie, mais dans d’autres secteurs aussi, je pense aux infirmiers, aux aides à domicile – peinent à recruter.
 
Ce plan d’urgence permettra enfin de prolonger le dispositif fiscal exceptionnel de suramortissement, qui devait se terminer en avril, pour encourager les investissements industriels – et que nous allons poursuivre, parce que ça marche.
 
Deuxième chantier : Michel SAPIN et Emmanuel MACRON présenteront bientôt un projet de loi pour encourager le développement des entreprises, notamment des plus petites, en facilitant plus encore leur adaptation au numérique et en améliorant leur financement. Ce texte donnera également plus de mobilité aux salariés en facilitant l’installation des indépendants.
 
Enfin, troisième chantier … je crois que vous en avez entendu parler : la loi « nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actifs », portée par Myriam El KHOMRI, qui vient d’être envoyée au Conseil d’Etat et qui sera présentée le 9 mars en Conseil des ministres.
 
Les Français savent bien que le statu quo, l’immobilisme, nous condamneraient ; qu’il faut aller encore plus loin dans le mouvement des réformes, avec une démarche audacieuse et nouvelle.
 
Le sens de cette loi est de donner plus de liberté aux entreprises. Elles pourront, avec leurs salariés, prendre les décisions qui les concernent, notamment pour l’organisation du temps de travail – dans le respect bien sûr de la durée légale. Plus de lisibilité, aussi, quant aux motifs pouvant justifier un licenciement économique – ils seront désormais inscrits dans la loi, nous transcrivons tout simplement la jurisprudence – et aux conséquences d’une rupture de contrat aux prud’hommes.
 
Plus de liberté – et c’est un beau mot, la liberté, qu’il faut assumer –, mais aussi plus de droits pour les actifs, avec un compte, le compte personnel d’activité, qui regroupera à partir du 1er janvier 2017 leurs droits à la pénibilité – et ici, dans cette entreprise, vous avez un temps d’avance –, à la formation, pour qu’ils puissent les utiliser tout au long de leur carrière et se former ainsi, par exemple, pendant les périodes de chômage.
 
Je veux rappeler aussi que cette loi portera une réforme de la médecine du travail, pour un vrai suivi médical des salariés et une meilleure protection de ceux qui en ont le plus besoin. Et en venant, nous rappelions avec Myriam El KHOMRI et Emmanuel MACRON – et nous avons beaucoup parlé de numérique en ce début d’après-midi – que la loi prévoit également un droit à la déconnexion, suite au rapport METTLING dont tout le monde a souligné la qualité, pour que le numérique soit un atout pour l’entreprise, pour les salariés, pour ne pas que ce numérique soit une souffrance au travail.
 
Ce projet de loi, et je veux le souligner avec beaucoup de force, beaucoup de détermination, mais aussi de l’enthousiasme, c’est un acte de confiance.
 
Un acte de confiance adressé aux chefs d’entreprise, aux patrons de TPE et de PME, aux chefs des grands groupes industriels de notre pays, qui développent leur activité. La France a besoin de compétitivité, et pour avoir de la compétitivité, elle a besoin des entreprises.
 
C’est un acte de confiance à l’égard des salariés, qui sont engagés dans la réussite de leur entreprise.
 
C’est un acte de confiance adressé à leurs représentants, pour construire, dans le cadre d’un dialogue permanent avec les employeurs – et vous-même vous soulignez la qualité du dialogue social, et la qualité du dialogue social est un plus pour la compétitivité de nos entreprises – les meilleures solutions pour l’emploi, pour la croissance, pour la formation et pour les droits des salariés. Les entreprises, les entrepreneurs et les salariés pourront ainsi décider des règles qui leur conviennent le mieux. C’est un accord gagnant-gagnant, pour les entrepreneurs comme pour les salariés.
 
Et puis c’est enfin un message adressé, parce qu’on les oublie tout le temps, aux 3,5 millions de chômeurs de notre pays : chômeurs de longue durée, jeunes qui n’arrivent pas à entrer sur le marché du travail, seniors qu’on ne reprend pas dans une entreprise. C’est un message de confiance pour leur dire que nous n’acceptons pas la fatalité qui voudrait que tout ait été essayé. Non : tout doit être tenté et nous ne devons jamais baisser les bras.
 
La méthode de ce texte, c’est le débat, c’est la discussion. Je vous le disais il y a un instant : le Conseil des ministres va l’adopter le 9 mars prochain, et l’Assemblée nationale va en débattre, d’abord au sein de ses commissions et ensuite dans l’hémicycle, à partir du 4 avril.
 
C’est une réforme indispensable. Lisez-là ! Beaucoup d’expressions aujourd’hui sur ce texte-là … de la part de ceux qui ne l’ont pas lu. Il y a beaucoup de bêtises qui sont écrites ici ou là. Non, nous ne remettons pas en cause la durée légale du travail. Non, le CDI n’est pas mis en cause. Oui, on continuera, bien sûr, à majorer les heures supplémentaires.
C’est une réforme indispensable … il n’y a pas, d’un côté, une politique dite « libérale » et de l’autre, une politique qui protégerait les salariés. Il y a ce qui est pragmatique et efficace, il y a le devoir de tout faire pour l’emploi, pour la compétitivité et pour faire baisser le chômage. Il faut bouger ! Il y en a qui sont encore au XIXème siècle. Les membres du gouvernement ici présents et moi, nous sommes résolument dans le XXIème siècle et nous savons qu’économie et progrès social vont de pair. Nous nous sommes inspirés de ce qui marche dans d’autres pays, en Allemagne, en Suisse, en Italie, en Espagne. Moi je veux que nous prenions tout ce qui marche dans les autres pays et qui correspond à nos valeurs et à notre modèle social.
 
Mesdames et messieurs,
 
Il y a deux ans, PSA a conclu un nouveau contrat social, avec des efforts de la part des salariés – reclassements internes, départs volontaires, départs en retraite anticipée – pour conforter la compétitivité des sites français  dans un secteur qui n’allait pas bien, celui de l’automobile. Et les résultats sont là aujourd’hui. PSA recrute à nouveau, notamment des jeunes en apprentissage.
 
Cette démarche a également conduit PSA à mettre en place dans plusieurs régions, et notamment ici à Mulhouse, une plateforme régionale de mobilité pour faciliter les mobilités entre les entreprises du territoire. Nous venons ainsi de rencontrer deux salariés de Solvay qui étaient, il y a peu, chez PSA. Voilà ce qui se passe, quand les acteurs privés et publics conjuguent leurs efforts !
 
Tout faire pour l’emploi, c’est enfin mobiliser toutes les énergies : l’Etat, bien sûr, Pôle emploi, mais aussi les entreprises, les partenaires sociaux … et les nouvelles grandes régions. Car ce sont elles qui connaissent le mieux les forces et les besoins de leur territoire.
 
Et je veux saluer Philippe RICHERT, qui n’a pas hésité, ni en tant que président de région, ni en tant que président de l’Association des Régions de France, à s’engager avec détermination et – vous le savez bien, vous le connaissez – pour l’emploi. A s’y engager aux côtés du gouvernement, dans une belle démarche républicaine, avec comme seule considération l’intérêt général.
 
Il y a quelques semaines, après les élections régionales – et vous savez quelle a été la nature du débat, ici, dans cette grande région –, beaucoup ont parlé d’unité nationale, de rassemblement, sur toutes les questions : face à la menace terroriste, mais aussi dans le domaine de l’emploi. Et malheureusement, on oublie très vite ces engagements … Eh bien moi je crois qu’à travers le texte qui va être défendu, avec talent, par Myriam El KHOMRI et la démarche que nous pouvons mener avec les régions, il est temps de passer aux travaux pratiques. D’oublier les querelles qui ne servent à rien. Les Français veulent du rassemblement, sur la sécurité, comme sur l’emploi ; oublier les querelles idéologiques, les postures, pour être concret et pour faire avancer l’intérêt du pays, c’est-à-dire l’intérêt des entreprises, c’est-à-dire l’intérêt des salariés.
 
Nous travaillons, monsieur le président, d’ores et déjà ensemble sur le plan d’urgence pour l’emploi ; il y a bientôt une réunion autour de la ministre, et nous signerons avant la fin mars une plateforme d’engagements entre l’Etat et votre association pour réaffirmer le rôle des régions dans les domaines de la formation, de l’apprentissage, du développement économique, de l’emploi, et dans bien d’autres secteurs – je pense aux transports. Je m’y suis personnellement engagé, je sais que les travaux de préparation avancent et je sais, cher Philippe, qu’ensemble, nous aboutirons à un pays décentralisé. La décentralisation, c’est faire confiance aux élus au niveau d’une région, d’un département, d’une commune ou d’une intercommunalité. La décentralisation … au fond … c’est la confiance aux entrepreneurs et aux salariés, au plus près de l’entreprise.
 
Mesdames, messieurs,
 
Chalampé illustre la capacité de l’industrie à innover. Oh, je sais, il y a d’autres secteurs qui eux vont moins bien, et avec Emmanuel MACRON, tous les jours, nous sommes sur ces dossiers. Il faut soutenir les petites et les moyennes entreprises, leur permettre d’acquérir le niveau suffisant pour être plus compétitives, notamment à l’export. Je connais la souffrance des salariés qui perdent ou qui ont peur de perdre leur emploi ; et je sais aussi l’inquiétude des responsables de ces entreprises.
 
Mais moi je suis fier quand je vois ces entreprises qui se modernisent, qui innovent pour avancer et faire avancer la France. Cette capacité à se réinventer doit être ce qui caractérise l’ensemble de l’économie française ; et soyez assuré qu’avec Myriam El KHOMRI et Emmanuel MACRON – qui représentent aussi une génération de responsables publics, deux ministres qui en veulent, qui veulent des résultats, qui sont solidaires et qui ensemble veulent faire gagner ce gouvernement, parce qu’ils veulent faire gagner la France – nous sommes déterminés à tout mettre en œuvre pour cela.
 
Car c’est ainsi, en mobilisant tous les acteurs, en agissant pour la compétitivité, en stimulant l’investissement, en encourageant l’innovation, en tentant ce qui n’a jamais été tenté, en réformant, en un mot, en saluant le texte de loi de Myriam EL KHOMRI, que nous créerons l’emploi dont notre pays a besoin ; et c’est ainsi que nous redonnerons confiance aux Français.
 
Regardez les sourires des apprentis que nous avons rencontrés il y a un instant. Il y a un regard sur la France à l’extérieur qui est positif, parce que nous nous réformons, et il y a une envie de conquérir tout simplement la vie, de la part de notre jeunesse. C’est vers cette jeunesse, et c’est vers ces salariés, ces apprentis que nous devons d’abord nous tourner. C’est cet optimisme que nous avons bien senti, ici, parmi vous ; et pour cela, merci encore à chacune et à chacun d’entre vous.
 
 
Discours du Premier ministre à Solvay (Haut-Rhin) sur l’emploi

Author: Redaction