Une étrange réforme des retraites

Les médias et la presse annoncent le lancement d’une réforme qui porterait l’âge du départ à la retraite de 62 à 64 ans. Comment l’interpréter? De prime abord, rien n’est plus étrange qu’un projet de réforme de grande ampleur lancé à 10 mois des échéances politiques nationales. La France avait les cinq ans du quinquennat pour réformer les retraites. Pour une réforme de cette ampleur, en tenant compte de la préparation du projet, des concertations avec les partenaires sociaux, du débat parlementaire, 18 mois est sans doute un minimum. Or quel temps utile reste-t-il? Entre le début actif des travaux de concertation en septembre et le démarrage de la campagne présidentielle, disons au plus tard début mars: guère plus de 6 mois. Difficilement concevable. Alors comment l’expliquer? Le macronisme n’est pas quelque chose de foncièrement nouveau mais plutôt la quintessence d’une évolution de long terme. Il consiste à sublimer le déclin français (économique et financier, intellectuel, scolaire, sécuritaire, étatique, etc.) dans l’exaltation d’un culte de la personnalité autour de l’occupant de l’Elysée avec comme but suprême sa réélection. C’est tout ce qui compte. La sublimation d’un gourou national, selon ce modèle, transcende les désastres et les malheurs collectifs et même s’en nourrit. L’annonce de la réforme des retraites s’inscrit dans cette logique. En soi, dans les conditions présentes, sa nécessité ou son urgence est discutable: si le pouvoir avait la moindre velléité de s’intéresser aux comptes publics et au bien commun, il adopterait des mesures immédiates pour tenter de résorber les vertigineux déficits qu’il a lui-même creusés (10 % du PIB) avant de songer aux effets de long terme d’une réforme des retraites. La question n’est pas là. Cette nouvelle annonce, improvisée et à contre-temps est avant tout politique – électoraliste. Elle vise à magnifier l’image du grand réformateur en misant sur le chaos social qu’elle s’apprête à déclencher pour l’enrichir. Autrement dit elle a pour objectif non-dit de provoquer le désordre et les destructions pour renouer avec le culte d’un sauveur providentiel et préparer sa réélection. Un tel schéma repose sur un pari évident: le pari de l’abêtissement d’un peuple qui n’y verrait que du feu. Mais telle est aussi la faille de la stratégie: les Français sont infiniment plus lucides que ne l’imaginent généralement leurs dirigeants.

Maxime TANDONNET

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Author: Redaction