Les non-dits d’une descente aux enfers

Coypel-A-nD’après Opinion way du Figaro magazine, "3% des Français souhaitent que François Hollande se représente en 2017". 3%! La descente aux enfers de l’impopularité atteint un niveau vertigineux, annonciateur peut-être d’une grave secousse politique. Attention: je ne cherche pas à le défendre ni à l’accabler davantage, j’essaye uniquement de comprendre... La "chute" du président Hollande me semble avoir trois dimensions: s’il est responsable de la première, les deux autres lui échappent.

  • Par ses choix politiques,  le président s’est mis l’ensemble du pays  à dos: la droite avec le "mariage pour tous" et la politique "Taubira"; la gauche, avec son "pacte de responsabilité"; et tout le monde, indistinctement avec ses engagements hasardeux et non tenus sur l’emploi et une politique de matraquage fiscal qui a plombé l’économie française.
  • Son impopularité a pris en outre une dimension irrationnelle, relevant de la "psychologie des foules", qui dépasse largement la critique de sa politique: le président est devenu une sorte de "tête de turc" de la société française, ou "bouc émissaire" au sens biblique de l’expression, auquel on fait porter tout le poids du péché collectif et de la souffrance physique et morale d’un pays. Il incarne, par son image même, son apparence, les complexes d’une France qui perd pied à tous les niveaux.
  • Elle prend également une connotation stratégique: il me paraît assez clair que la France "de gauche" est en train de le lâcher, de retourner sa veste et de jouer la carte "Valls" espérant ainsi conserver le pouvoir politique en 2017.

Il me semble légitime de se poser une question simple: quel piège recèle la passion antiCouv. Histoire présidents-Hollande devenue un véritable phénomène de société, une mode idéologique véhiculée par le monde médiatique, y compris désormais la presse de gauche?  La cote de popularité de Valls est elle, bien au contraire, au zénith. Or, nul ne voit en quoi les orientations et les choix de ce dernier ni ses résultats ne se différencient de ceux du chef de l’Etat. Serait-ce une simple affaire de physique et de communication? Pareille hypothèse, si elle était avérée,  en dirait long sur l’état de déliquescence de la conscience politique de notre pays… Dans la conclusion de mon livre, "Histoire des présidents de la République" (Perrin 2013), j’explique pourquoi depuis une trentaine d’années, le chef de l’Etat de la Ve République n’est plus aussi puissant ni influent que jadis. Faire porter à Hollande tous les maux de la France est une manière d’en blanchir les autres responsables, le peuple qui le maudit après avoir voté pour lui à 52% en toute connaissance de cause (Hollande n’a fait qu’appliquer le programme pour lequel il a été élu, y compris sur la fiscalité), les officines idéologiques qui ont travaillé à son succès, le monde médiatique, journalistique, universitaire, associatif qui tient les leviers de l’opinion et s’est embrasé en sa faveur avant de le lâcher. La chute de Hollande? Et après? Pour installer à l’Elysée Valls ou Juppé? Et le reste inchangé, intégralement préservé, figé, dans une France conservatrice qui refuse les profondes et douloureuses réformes indispensables à son avenir, ainsi apurée de son souffre-douleur, coupable idéal, bouc émissaire, où tout pourra continuer comme avant, dans la bonne conscience générale… La France se prépare, de toute évidence, à lui faire porter le chapeau de son mal-être présent. Et après?

Maxime TANDONNET


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Author: Redaction