Intervention de Marisol Touraine
Ministre des Affaires sociales et de la Santé
Conférence de presse pour le lancement de la campagne de communication relative à la fin de vie
Lundi 20 février 2017
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Madame la directrice générale adjointe de la Santé, Anne-Claire AMPROU,
Madame la présidente du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, Docteur Véronique FOURNIER,
Messieurs les députés, Alain CLAEYS et Jean LEONETTI,
Mesdames et Messieurs,
La fin de vie s’est imposée comme un enjeu majeur de société. Parce qu’elle renvoie à des questionnements éminemment complexes. Des questionnements à la fois individuels et collectifs, profondément intimes et de plus en plus affirmés. La modernité d’une société se mesure en grande partie à sa manière d’accompagner chacun jusqu’au bout, mais aussi à sa capacité à entendre ses aspirations et à respecter sa dignité et sa volonté.
Le Président de la République a voulu que ce sujet soit abordé résolument mais de manière apaisée, dans le rassemblement.
1. C’est ce que nous avons fait depuis 2012 en renforçant les droits des patients
Dès 2012, une réflexion et un débat citoyen ont été engagés. Le rapport SICARD, l’avis du comité consultatif national d’éthique (CCNE) et le débat citoyen qui l’a suivi, ont constitué un préalable solide au débat législatif.
La loi portée par les députés Alain CLAEYS et Jean LEONETTI a été adoptée le 6 février 2016. Cette loi créant de nouveaux droits pour les malades et les personnes en fin de vie consacre une étape majeure. A partir du principe réaffirmé selon lequel « toute personne a droit à une fin de vie digne et apaisée », ce texte opère un changement de paradigme historique : pour la première fois, c’est au patient et à lui seul qu’il appartient de décider de pouvoir terminer sa vie aussi dignement qu’il a vécu, sans souffrance et de demander une sédation profonde et continue jusqu’au décès. Pour s’assurer du respect de son choix, les directives anticipées s’imposent désormais au médecin. Le rôle de la personne de confiance a également été renforcé.
Parallèlement aux débats parlementaires, j’ai lancé en 2015 un plan pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie. L’objectif de ce plan est de répondre aux attentes des patients mais aussi des professionnels de santé, confrontés à des situations très difficiles et pour lesquelles ils ne sont pas toujours préparés.
Un an après les résultats concrets sont au rendez-vous. Des moyens supplémentaires ont été alloués aux unités de soins palliatifs et aux lits identifiés soins palliatifs. En 2016, 14 millions d’euros ont permis de renforcer les équipes intervenant au domicile – y compris en maison de retraite –. Une filière universitaire en médecine palliative a été créée. Des recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) ont été éditées à destination des professionnels. Une fiche de liaison avec les centres de régulation des services d’urgence a également été mise en place pour éviter les ré-hospitalisations et s’assurer que les souhaits des patients de rester chez eux soient respectés.
L’action menée au cours de ce quinquennat aura donc permis de renforcer l’accompagnement des malades en fin de vie, avec des droits nouveaux, et avec un investissement majeur pour les soins palliatifs.
2. Mais un tel engagement n’a de sens que si les Français disposent pleinement des moyens de s’en emparer. J’ai donc voulu agir résolument pour renforcer l’information des Français et leur permettre de s’emparer de leurs nouveaux droits.
Parce qu’aujourd’hui, 9 Français sur 10 ne connaissent pas la loi. C’est inacceptable.
Chaque Français doit pouvoir connaître ses droits et aussi être en mesure de décider pour sa fin de vie. Chaque Français doit savoir que son avis sera respecté au moment des décisions essentielles le concernant, même s’il n’est plus conscient pour l’exprimer.
C’est pour cela que j’ai créé le centre national des soins palliatifs et de la fin de vie – dont je veux saluer la présidente – : pour mieux informer les professionnels de santé et les Français sur leurs droits, leur parcours et les ressources disponibles pour les accompagner. Je lui ai confié une mission essentielle : mettre en place la première campagne nationale d’information d’ampleur sur la fin de vie. Je suis heureuse de pouvoir vous la présenter ce matin.
3. L’enjeu de cette campagne, c’est de faire naître le débat autour de la fin de vie, qui reste encore trop souvent tabou.
Car il ne suffit pas d’avoir des droits, de les connaître, encore faut-il être accompagné pour les exercer.
La question de la fin de vie peut faire peur – comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement ? –. Nous devons donc aider les Français à lever cette angoisse, à l’aborder avec sérénité, en famille, avec leurs proches, avec leur médecin aussi.
Nous allons donc porter un message clair et apaisant : « La fin de vie, et si on en parlait ? ». L’enjeu n’est pas de brusquer, de culpabiliser ou d’orienter, mais d’encourager chacun à s’emparer du sujet. Il ne s’agit en aucun cas d’être prescriptif. L’objectif, c’est de provoquer un « déclic » : se poser les bonnes questions avant que les drames n’arrivent, parler – souvent pour la première fois – de la fin de vie, faire connaître ses volontés à un moment où l’on est en mesure de le faire.
En décembre dernier, j’ai lancé le premier volet de cette campagne pour inviter les professionnels de santé à parler de la fin de vie avec leurs patients. Avec ce deuxième volet, nous nous adressons à tous les Français.
A partir d’aujourd’hui et jusqu’au 20 mars prochain, la campagne se déploiera dans la presse et sur les réseaux sociaux. Un spot TV sera diffusé sur les principales chaînes de la TNT. Je vous invite à le découvrir maintenant.
Par ailleurs, à partir d’aujourd’hui le site Internet parlons-fin-de-vie.fr permettra d’obtenir des informations claires sur toutes les questions que l’on peut légitimement se poser : comment rédiger ses directives anticipées ? Comment désigner sa personne de confiance ? Ce site vient s’ajouter au service d’écoute qui existe déjà, le 08 11 02 03 00, pour poser des questions sur la fin de vie et être orienté vers les bonnes personnes.
Mesdames et messieurs,
Avec cette campagne de communication, je souhaite que chaque Français puisse de manière sereine aborder la perspective de sa fin de vie. Pour cela, chacun peut, doit s’engager pour diffuser et relayer ce message, à commencer par les professionnels de santé, bien sûr, qui ont un rôle central.
C’est un enjeu de société pour réduire les inégalités face à la mort. C’est un enjeu de citoyenneté, aussi. Pour qu’une loi produise ses effets, elle doit être connue de tous. Ce n’est pas pour les autres, pour après, pour jamais. C’est aujourd’hui pour que, le plus tard possible, et peut-être jamais, nos proches n’aient pas à se demander ce que nous voulions.
Je vous remercie.