stock-options et mobilités internationale

Il y a en France, une certaine tradition juridique qui veut qu’on légifère très peu sur les sujets qui relèvent du droit international et en particulier sur le conflit mobile, c’est-à-dire sur le changement d’un élément de rattachement avec la loi française. 
D’une manière générale, pour répondre à la question de savoir si dans les situations internationales, il faut appliquer la loi française ou une loi étrangère lorsqu’une personne a déménagé à l’étranger on a traditionnellement recours à la jurisprudence…En d’autres termes, on laisse aux savants de l’Île de la Cité (la Cour de Cassation), la possibilité de débattre de la question et d’arrêter un principe. Avec la construction européenne, il est devenu nécessaire de régler de manière uniforme les questions relatives au droit international privé, ce qui explique la multiplication des règlements communautaires directement applicables en France en la matière.
Or, l’une des difficultés de l’harmonisation européenne, c’est qu’elle ne concerne pas la fiscalité. Il y a bien un mouvement très puissant  qui pousse à limiter-voir interdire- la possibilité pour des résidents d’un Etat de cacher les revenus qu’ils retirent de fonds placés dans les autres Etats. Mais, il n’y a pas de normes d’harmonisation pour déterminer, dans les situation de mobilité internationale, comment concilier le principe de la liberté de circulation des personnes avec le caractère national et Étatique de l’impôt sur les revenus.
La commission y réfléchit…..
Chaque Etat y va de ses mesures, entre d’une part, le soucis d’attirer les travailleurs ou les capitaux pour développer son territoire et d’autre part, la préoccupation de rendre plus difficile la sortie de ce territoire.En d’autres termes, ce que le traité CE donne, la fiscalité le reprend. La situation devient exacerbée, car Comme en 1929, la crise financière et économique entraîne un regain de protectionnisme. Mais, à la différence de 1929, les mesures protectionnistes ne concernent pas seulement le commerce international, mais l’ensemble des échanges internationaux dans leur dimensions multiformes.
Il y a quelques temps, j’exposais la problématique des stocks-options et actions gratuites dans le contexte international. Le sujet est très compliqué en raison de la nature mixte de ces modes de rémunération. Ils sont liés au travail mais la richesse produite par ces mécanismes est directement lié au capital, c’est-à-dire à l’évolution de la valeur du titre. Une jurisprudence avait été rendue concernant un français qui était parti vendre ses stocks en Belgique pendant la période d’indisponibilité fiscale. J’avais fait un billet sur cette jurisprudence, au stade de l’appel, puis n’avais plus rien écrit sur ce sujet, pour des raisons qui tiennent à mon activité professionnelle.
A mesure que les situations où les installations à l’étranger pour éviter l’impôt en France se sont industrialisées, l’administration fiscale a eu l’intelligence de modifier sa loi pour rendre crédibles les mesures de protectionnisme qu’elle instituait dans cette matière. L’idée était qu’il fallait rattacher les gains de stocks et d’actions gratuites au revenus du travail pour conserver le droit de taxer les gains relatifs aux stocks-options et actions gratuites si les stocks ont été donnés dans le cadre d’un travail effectué en France. C’est la raison pour laquelle, la terminologie a changé: désormais la loi ne fait plus état d’une plus-value d’acquisition , mais plus simplement de gain d’acquisition. Exit la notion de plus-value et de capital. Par ailleurs et surtout, le législateur s’est doté des moyens de taxer les non résidents. Il a institué une retenue à la source pour les gains réalisés par ces derniers. Impossible aujourd’hui, de soutenir que quand bien même une convention internationale attribuerait le droit de taxer à la France, la législation française interne ne permettrait pas cette taxation, car la loi française est lacunaire quand il s’agit de traiter des aspects de droit international…
Comment déterminer, dans les cas de mobilité internationale, la rémunération attachée au travail en France et celle qui est attachée au travail à l’étranger? C’est l’objet:
–  du Bulletin Officiel des Impôts 5B-10-12 sur le prélèvement à la source des revenus de stocks-option. L’instruction dit qu’une entreprise qui ne fait pas se prélèvement pour les gains de ses non résidents encourt des risques pénaux. Elle dit aussi que les entreprises ne sont pas obligées de le faire pour les plans mis en oeuvre avant la loi TEPA…
– du Bulletin Officiel des Impôts 14A-3-12 sur la conciliation de la position de l’administration fiscale française avec les conventions internationales.
Nous ne pouvons que nous réjouir de ces instructions dans la mesure où pour le moment, les solutions retenues par l’administrations étaient très disparates et posaient une réelle difficulté pour ce qui est du principe de l’égalité de traitement (enfin pour ceux qui y croient encore).
Est-ce que ces principes seront admis par les magistrats en cas de contentieux? A notre avis, la réponse tient à l’application de la loi dans le temps. Les textes de loi à ce jour, devraient permettre à l’administration de faire valoir son point de vue. C’est beaucoup plus discutable pour les textes anciens. 
La preuve: pourquoi l’administration accepterait de renoncer à la retenue à la source pour les plans pré-tepa alors que le contribuable devrait forcément payer l’impôt? 
Ici, il faudra sans doute traverser la Seine, et prendre l’avis des savants du Conseil d’Etat.
Stanislas Lhéritier

Author: Redaction