Origine de la vie : la pièce manquante détectée dans une «comète artificielle»

Pour la première fois, des chercheurs montrent que le ribose, un sucre à la base du matériel génétique des organismes vivants, a pu se former dans les glaces cométaires. Pour parvenir à ce résultat, des scientifiques de l’Institut de chimie de Nice (CNRS/Université Nice Sophia Antipolis) ont analysé très précisément une comète artificielle créée par leurs collègues de l’Institut d’astrophysique spatiale (CNRS/Université Paris-Sud).

Ils présentent ainsi, en collaboration avec d’autres équipes dont une du synchrotron SOLEIL, le premier scénario réaliste de formation de ce composé essentiel, encore jamais détecté dans des météorites ou dans des glaces cométaires. Étape importante dans la compréhension de l’émergence de la vie sur Terre, ces résultats sont publiés dans la revue le 8 avril 2016.

Tous les organismes vivants sur Terre, ainsi que les virus, ont un patrimoine génétique fait d’acides nucléiques – ADN ou ARN2. L’ARN, considéré comme plus primitif, aurait été l’une des premières molécules caractéristiques de la vie à apparaitre sur Terre. Les scientifiques s’interrogent depuis longtemps sur l’origine de ces molécules biologiques. Selon certains, la Terre aurait été « ensemencée » par des comètes ou astéroïdes contenant les briques de base nécessaires à leur construction. Et effectivement, plusieurs acides aminés (constituants des protéines) et bases azotées (l’un des constituants des acides nucléiques) ont déjà été trouvés dans des météorites, ainsi que dans des comètes artificielles, reproduites en laboratoire . Mais le ribose, l’autre constituant-clé de l’ARN, n’avait encore jamais été détecté dans du matériel extraterrestre, ni produit en laboratoire dans des conditions « astrophysiques ». En simulant l’évolution de la glace interstellaire composant les comètes, des équipes de recherche françaises ont réussi à former du ribose – étape importante pour comprendre l’origine de l’ARN et donc les origines de la vie.

Dans un premier temps, une « comète artificielle » a été produite à l’Institut d’astrophysique spatiale : en plaçant dans une chambre à vide et à − 200 °C un mélange représentatif d’eau (H2O), de méthanol (CH3OH) et d’ammoniac (NH3), les astrophysiciens ont simulé la formation de grains de poussières enrobés de glaces, la matière première des comètes. Ce matériau a été irradié par des UV – comme dans les nébuleuses où se forment ces grains. Puis, l’échantillon a été porté à température ambiante – comme lorsque les comètes s’approchent du Soleil. Sa composition a ensuite été analysée à l’Institut de chimie de Nice grâce à l’optimisation d’une technique très sensible et très précise (la chromatographie multidimensionnelle en phase gazeuse, couplée à la spectrométrie de masse à temps de vol). Plusieurs sucres ont été détectés, parmi lesquels le ribose. Leur diversité et leurs abondances relatives suggèrent qu’ils ont été formés à partir de formaldéhyde (une molécule présente dans l’espace et sur les comètes, qui se forme en grande quantité à partir de méthanol et d’eau).

S’il reste à confirmer l’existence de ribose dans les comètes réelles, cette découverte complète la liste des « briques moléculaires » de la vie qui peuvent être formées dans la glace interstellaire. Elle apporte un argument supplémentaire à la théorie des comètes comme source de molécules organiques qui ont rendu la vie possible sur Terre… et peut-être ailleurs dans l’Univers.

Ces travaux ont bénéficié du soutien financier de l’Agence nationale de la recherche et du CNES.

Lire l’article illustré complet publié par le CNRS.

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Author: Redaction