« Octobre rose » : discours de Marisol TOURAINE


Intervention de Marisol Touraine
Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes
Conférence de presse « Octobre rose »
Mardi 29 septembre 2015

(Seul le prononcé fait foi)

**********

Monsieur le directeur général de la Santé, Benoît VALLET,
Madame la présidente de l’Institut national du cancer (INCA), Agnès BUZYN,
Monsieur le directeur général de l’Institut national de veille sanitaire (InVS), François BOURDILLON,
Mesdames, messieurs,

Le cancer du sein tue. Près de 12 000 femmes en meurent chaque année en France. Il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique, qui concerne l’ensemble de la société. Une femme sur huit est touchée par ce cancer au cours de sa vie.

Nous ne le dirons jamais assez : lorsqu’il est détecté à un stade précoce, le cancer du sein se guérit dans plus de 9 cas sur 10. L’efficacité du dépistage est vitale. Elle impose à la société de se mobiliser collectivement, parce que la mobilisation donne des résultats. La mortalité par cancer du sein a diminué de 1,5 % par an depuis 2005, grâce à la précocité des diagnostics et aux progrès de la prise en charge.

Mais cette dynamique reste fragile. Il nous faut donc poursuivre, amplifier, innover dans ce travail qui fait intervenir des acteurs divers et des secteurs multiples. C’est tout l’intérêt de l’opération « Octobre rose » renouvelée chaque année.

I- « Octobre rose », c’est d’abord l’occasion de répéter à toutes les femmes de 50 ans à 74 ans qu’il existe pour elles le programme de dépistage organisé et gratuit du cancer du sein.

Nous ne rappellerons jamais assez les recommandations formulées par les autorités de santé. Toutes les femmes entre 50 et 74 ans, à risque « moyen », c’est-à-dire sans antécédents personnels ou familiaux associés à un risque de cancer, ont le droit de bénéficier gratuitement d’une mammographie de dépistage tous les deux ans.

Pour diffuser ce message le plus largement possible, nous allons relancer une campagne de sensibilisation, dans la lignée des années précédentes. Dès aujourd’hui : le site Internet de l’Institut national du cancer (INCA) e-cancer.fr est enrichi de nouveaux contenus dynamiques pour mieux comprendre, mieux prévenir et mieux dépister ; des affichettes, des dépliants, des brochures contenant toutes les informations nécessaires seront diffusés très largement.

Mais nous ne pouvons en rester là. Car nous savons combien il est difficile, pour certains de nos concitoyens, d’accéder à l’information. Les milieux sociaux défavorisés sont évidemment les plus concernés. Alors nous allons nous appuyer sur cette nouvelle campagne pour aller vers les femmes éloignées des démarches de prévention. Concrètement, nous diffuserons par exemple des affichettes et des dépliants traduits ou illustrés pour sensibiliser les femmes moins à l’aise avec l’écrit ou d’origine étrangère. Nous nous inscrivons ici dans la démarche du Plan cancer 2014-2019 qui a fait de la réduction des inégalités d’accès à l’information une de ses priorités.

Enfin, nous rénovons l’accompagnement pratique des professionnels de santé dans leur pratique du dépistage. Concrètement, l’Institut national du cancer (INCA) diffusera des fiches d’aide actualisées et des emails personnalisés à destination des médecins généralistes, des gynécologues et des sages-femmes.

II- « Octobre rose », c’est aussi l’occasion de rappeler que certaines femmes sont plus à risque que d’autres et doivent donc être suivies de manière adaptée et financièrement soutenable pour elles.

Les niveaux de risque ne sont pas les mêmes selon les femmes. Ils doivent donc être déterminés et faire l’objet d’un suivi adapté :

* Le niveau de risque « moyen », tout d’abord. Il concerne les femmes entre 50 et 74 ans qui ne présentent pas de facteur de risque particulier. Chez ces femmes, c’est l’âge qui représente un facteur de risque. Nous venons d’en parler. Ce sont les femmes concernées par le dépistage organisé de 50 à 74 ans.

* Le niveau de risque « élevé », ensuite. Il concerne les femmes présentant certains risques particuliers, comme des antécédents personnels de cancer ou de maladie du sein, ou bien qui ont eu une radiothérapie à haute dose au niveau du thorax. Elles font l’objet d’un suivi spécifique précisé dans une recommandation publiée par la Haute Autorité de Santé (HAS) en mai 2014.

Aujourd’hui, seules, dans cette catégorie, les femmes ayant été touchées par un cancer peuvent bénéficier du dispositif « post ALD » qui permet une prise en charge à 100% des examens de surveillance nécessaires. Cependant, il est aujourd’hui insuffisamment utilisé. C’est pourquoi nous allons renforcer la communication sur cette prestation à l’attention des professionnels de santé et des femmes.

Demain, toutes les femmes à risque « élevé » bénéficieront d’une prise en charge à 100% par l’assurance maladie de leurs examens de dépistage avec la fréquence recommandée par le médecin qui les suit.

* Le niveau de risque « très élevé », enfin. Il concerne les femmes qui ont une histoire familiale de cancer du sein ou de l’ovaire, mais aussi les femmes porteuses d’une mutation génétique BRCA1 ou BRCA2. Une consultation d’oncogénétique est indiquée dans ce cas et ces femmes doivent bénéficier d’un suivi médical rapproché (tous les 6 mois ou annuel).

Pour ces femmes au risque « très élevé » qui bénéficient aujourd’hui d’une prise en charge de droit commun, je souhaite qu’elles bénéficient aussi d’une exonération du ticket modérateur pour leurs examens de dépistage et de surveillance avec la fréquence recommandée. C’est une prise en charge à 100% qui est ici annoncée.

Mon objectif est que ces dispositifs soient opérationnels au plus tard au printemps 2016.

III- Enfin, « Octobre rose », c’est l’occasion d’une réflexion collective sur les marges de progression de notre politique de dépistage.

Dix ans après la généralisation du dépistage organisé, nous sommes confrontés à de nouveaux défis. Le taux de participation ne progresse plus, il stagne. Des femmes qui sont éloignées du système de santé n’accèdent pas au dépistage. Et puis, des controverses sont venues alimenter une méfiance chez certaines femmes.

Je l’ai dit tout à l’heure : mon ambition est de permettre à l’ensemble de la société de s’emparer de ce sujet. J’ai eu l’occasion d’annoncer la mise en place d’une concertation citoyenne et scientifique. Elle est aujourd’hui officiellement lancée. Patients, professionnels de santé, associations, institutions et structures régionales, chercheurs : la confrontation des points de vue et des expériences va nous permettre de progresser. L’INCA organisera une conférence de citoyennes, une conférence de professionnels de santé ainsi qu’une réunion publique nationale de clôture du débat citoyen.

Cette concertation, je la veux la plus accessible possible et donc ancrée dans le numérique. Concrètement, chacun pourra participer aux débats via une plateforme de contribution en ligne sur le site concertation-depistage.fr. Elle est ouverte dès aujourd’hui. Pour que cette plateforme soit connue du plus grand nombre, nous accompagnons son lancement d’une campagne de communication sur les réseaux sociaux.

Un rapport final formulera des propositions. Il me sera remis à l’été prochain. L’année prochaine, pour la saison 2016 « d’Octobre rose », nous vous présenterons ainsi une feuille de route pour faire évoluer la politique de dépistage.

Mesdames et messieurs,

Cette concertation citoyenne est un exemple concret de la démocratie sanitaire que je défends au sein du projet de loi de modernisation de notre système de santé. Parce que le cancer du sein concerne de nombreuses femmes, il concerne la société tout entière. Je sais pouvoir compter sur votre mobilisation et votre implication pour faire connaître la plateforme que je viens de vous présenter et la démarche participative qui nous conduira jusqu’à l’été prochain.

Je vous remercie.

Author: Redaction