Livret A : réforme de la formule de calcul du taux

Afin d’assurer la pérennité du financement du logement social, tout en protégeant les épargnants contre l’inflation, le ministère des Finances va procéder, sur proposition du Gouverneur de la Banque de France, à une réforme du calcul du taux du livret A. Le taux actuel de 0,75% sera maintenu jusqu’en août 2017.

En août dernier, le Gouvernement a décidé de maintenir le taux du livret A à 0,75% et il a accueilli favorablement la proposition de la Banque de France de le maintenir à ce niveau jusqu’à la fin du 1er semestre 2017. Parallèlement, le Gouverneur de la Banque de France a proposé au ministre des Finances de procéder à une adaptation de la formule du livret A‎, pour assurer le meilleur équilibre possible entre la maîtrise du financement du logement social et le maintien d’une protection des épargnants contre l’inflation en s’assurant que le taux fixé sera toujours supérieur à l’inflation.

Pourquoi engager cette réforme ?

L’écart entre les taux de marché et le taux du livret A est aujourd’hui croissant [1]. Or cet accroissement pénalise le secteur du logement social en augmentant ses charges (cf. question 5), comme s’en est récemment alarmée l’Union sociale pour l’habitat. En outre, cet écart croissant fragilise les équilibres financiers de la direction du Fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations, avec un impact potentiel important sur les finances publiques, de l’ordre de plusieurs milliards d’euros. Enfin, il obère la capacité des banques françaises à financer l’économie, en accentuant le décalage entre le coût de leurs ressources et celui de leurs emplois.

Or, en l’absence d’adaptation de la formule, cet accroissement de l’écart entre les taux de marché et le taux du livret A est probable dans les mois qui viennent, et pour une période qui pourrait être de plusieurs années [2].

La réforme que le Gouvernement propose permet de sécuriser pour l’avenir les régimes de l’épargne réglementée et du financement du logement social, en assurant leur équilibre financier.

En particulier, elle contient l’écart potentiellement croissant entre les taux d’intérêt et le taux du livret A, sans pour autant déstabiliser sa structure, en suspendant le facteur additionnel de 0,25 point de pourcentage de la formule lorsque l’écart entre l’inflation et les taux monétaires est supérieur à 0,25 point de pourcentage. Cette suspension ne sera effectuée que dans l’hypothèse où certaines conditions macro-économiques spécifiques seraient remplies : elle a donc un caractère temporaire.

Cette réforme préserve les intérêts des épargnants puisqu’elle maintient le caractère attractif de ce placement en comparaison avec les solutions d’épargne aux profils de risque équivalents (la nouvelle formule maintient le principe d’un lien très fort entre le taux du livret A et l’inflation). De l’autre côté, l’accès à une ressource pérenne reste assuré pour le secteur du logement social, avec un coût maîtrisé.

2 – Comment se calcule actuellement le taux du livret A ?

La formule de calcul actuelle du taux du livret A prévoit de prendre la plus grande des valeurs entre l’inflation majorée de 0,25 point de pourcentage et la moyenne entre l’inflation et la moyenne de l’Eonia et de l’Euribor 3 mois. Elle est entrée en vigueur, dans sa conception actuelle, en juillet 2004.

3 – En quoi consiste la modification de cette formule ?

La réforme comporte deux volets principaux :

  • D’abord, les indices actuellement utilisés dans la formule pour les taux monétaires et l’inflation seront lissés sur 6 mois, afin de prévenir toute variation brutale, à la hausse ou à la baisse, du taux du livret A ;
  • Ensuite, dans la nouvelle formule, la majoration de 0,25 point de pourcentage par rapport à l’inflation est suspendue dans certaines circonstances exceptionnelles : lorsque l’écart entre l’inflation et les taux monétaires est supérieur ou égal à 0,25 point de pourcentage.

D’un point de vue économique, cette suspension se justifie par le fait que lorsque l’inflation est déjà supérieure de 0,25 point de pourcentage aux taux monétaires, la majoration de 0,25 point de pourcentage n’est pas nécessaire pour garantir l’attractivité du livret A (placement par ailleurs défiscalisé, totalement liquide et garanti par l’État) vis‑à-vis des autres produits d’épargne à court terme (dépôts à vue), dont les taux de rémunération sont fixés en référence aux taux monétaires.

En outre, lorsque l’inflation est faible (par exemple 0,50%), un écart de 0,25 point de pourcentage représente proportionnellement un ajout beaucoup plus significatif que lorsque l’inflation se situe à des niveaux plus élevés.

D’un point de vue statistique, la proposition permet de remédier au cas particulièrement exceptionnel d’une inflation très supérieure aux taux monétaires.

4 – Quand la réforme entre-t-elle en vigueur et quels sont ses impacts, notamment sur le taux du livret A ?

La réforme entre en vigueur dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire le lendemain de sa publication au Journal officiel. Cependant, elle ne produira bien sûr ses effets qu’à l’occasion des révisions du taux du livret A. La prochaine révision doit ainsi intervenir en février 2017. Pour la période comprise entre février 2017 et août 2017, cette réforme n’aura pas d’impact dans la mesure où, comme annoncé en juillet dernier par le Gouverneur de la Banque de France, le taux du livret A devrait être maintenu à 0,75%.

Pour la suite, si l’écart entre l’inflation et les taux monétaires retenus dans la nouvelle formule est supérieur à 0,25 point de pourcentage, le taux du livret A obtenu par application de la nouvelle formule (et avant décision finale prise par le Gouvernement) serait diminué de 0,25 point de pourcentage par rapport au résultat qu’aurait donné l’ancienne formule. Cette diminution dépend toutefois du niveau moyen de l’inflation atteint sur les 6 mois précédant la fixation, or les prévisions d’inflation sont sujettes à des révisions fréquentes. Cette condition est d’ailleurs rarement remplie dans un contexte monétaire classique (cf. question 3).

Il faut également relever que le Gouvernement reste libre de fixer le taux du livret A qu’il estime opportun, si le Gouverneur de la Banque de France invoque des circonstances exceptionnelles (cf. question 6).

5 – Qu’adviendrait-il si la réforme n’était pas mise en œuvre ?

Un statu quo représenterait chaque année un coût additionnel d’environ 480 millions d’euros pour le secteur du logement social, sur les opérations déjà financées [3] 6 – Est-ce que la décision finale reviendra au pouvoir politique ?

Le pouvoir discrétionnaire du Gouvernement est maintenu, et ce à deux titres :

  • les modalités de calcul du taux du livret A sont fixées par arrêté et peuvent donc être revues sur décision du ministre de l’Economie et des Finances;
  • la réforme ne revient pas sur les dispositions actuelles du règlement CRBF 86-13 qui prévoient une application de la formule de calcul du taux du livret A automatique, sauf si le Gouverneur de la Banque de France propose d’y déroger en raison de « circonstances exceptionnelles » ou pour « préserver globalement le pouvoir d’achat des épargnants ». En ce cas, le Gouverneur propose un taux dérogatoire, et le Ministre fixe par arrêté un nouveau taux, après avoir saisi le CCLRF[4] pour avis.

  • [1] Cet écart est de 32 points de base en moyenne en 2016, contre 13 points de base en 2015.
  • [2] Au regard des anticipations du marché et des économistes sur l’inflation et les taux courts.
  1. [3] Sur la base d’un encours de prêts au logement social du fonds d’épargne de 152 Md€ à fin décembre 2015, indexé à 90 % sur le taux du livret A.
  • [4] Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières.

Relais de brève

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Author: Redaction