« La pensée blanche »

« Un jour, je demande à mon plus ancien ami : « Éric, tu as bien conscience que moi, je suis noir ? – Ouais. – Mais si moi, je suis noir, toi, tu es quoi… ? – Ben, je suis normal ». Ce drôle de mot, « normal », a été pour moi comme un détonateur. J’ai réalisé brutalement que les Blancs ne se voient pas blancs et, plus largement, qu’ils n’ont pas conscience de la position de domination dans laquelle l’histoire les a placés. […] C’est cela, la pensée blanche : je parle, je signifie aux autres ce qu’ils doivent être, mais personne n’est autorisé à parler de moi. La longue domination des hommes sur les femmes fonctionne selon le même principe. Ce livre revisite tout d’abord certains pans de l’histoire : les conquêtes coloniales, l’esclavage, les empires, le Code Noir, l’instrumentalisation de la science et de la religion, la post-décolonisation et le pillage des ressources naturelles, le vol du patrimoine africain… Il examine les mécanismes intellectuels invisibles qui assoient la domination des Blancs. Il désigne le racisme ordinaire de nos sociétés, tissé d’une succession de petits faits parfois connus, parfois pas du tout : joueurs de football noirs accueillis par des cris de singe, discriminations à l’embauche, contrôles policiers au faciès, politique de « quotas » des minorités… Pour autant ce n’est pas un livre « anti-Blancs » : il ne s’agit pas pour moi de pointer quiconque du doigt. Je ne demande qu’une seule chose : qu’on ouvre les yeux avec honnêteté et lucidité sur des faits. Mon rêve est que nous soyons capables d’affronter les problèmes sans préjugés, comme des femmes et des hommes qui descendent tous du même ancêtre. Ce livre entend participer à sa manière à la libération des esprits pour que nous puissions un jour dépasser les couleurs de peau, pour finir par nous considérer comme ce que nous sommes : des êtres humains. »

Qu’est-ce qu’un joueur de football? Un personnage médiatisé dont le rôle est de courir après un ballon et de frapper dedans à coups de pied ou avec la tête. Pour cet art sommaire, il peut amasser des fortunes gigantesques et la célébrité. Pas une once de mépris dans ce propos: rien n’empêche, en principe, un joueur de football de réfléchir, de s’instruire, et pourquoi pas, de devenir un intellectuel et d’écrire des livres intelligents (même si la probabilité est de fait réduite). Tel n’est pas le cas de celui-ci. La présentation ci-dessus du livre de M. Thuram repose sur une formidable contradiction. Tout le sens de son écrit consiste à attiser la haine du blanc, dont la pensée est assimilée à « la domination, le colonialisme, l’esclavagisme et le racisme (« les cris de singe »). Comment ne pas haïr, au point de vouloir tuer (exterminer?) le porteur d’une pensée aussi uniformément abjecte? Mais pourtant, ne lésinant pas sur la contradiction la plus évidente, tout en attisant, avec une violence inouïe, la rage fondée sur la couleur de peau, ce livre prétend ne pas être « anti-blanc » et vouloir « dépasser les couleurs de peau ». L’ouvrage trône en excellente place dans les rayons des librairies (vu hier, à Monoprix, où ne sont exposés que les bestsellers) Quand la sublimation de la médiocrité ouvre la voix à l’exaltation de la violence et de la haine.

Maxime TANDONNET

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Author: Redaction