Françallemagne?

Les élites françaises, depuis très longtemps sans doute, couvent en leur sein un vieux rêve non dit: celui d’une fusion entre la France et l’Allemagne. Ce projet, qui obsède en silence la France d’en haut, politique, administrative, intellectuelle, explique largement la résignation qui accompagne la prise de contrôle d’Alstom par Siemens. Il en fut tout autrement dans l’affaire du rachat des chantiers navals par l’Italie. Elle est dans l’ordre des choses, celui de l’intégration de la France dans un espace sous domination allemande. Pour ce faire, on s’en remet à de Gaulle et au traité franco-allemand de 1963. C’est un mensonge: de Gaulle ne concevait la relation franco-allemande que dans un contexte de stricte égalité entre les deux pays et d’indépendance des deux peuples.  Ce rêve caché explique aussi l’enthousiasme imbécile de la quasi totalité de la France d’en haut, tout le monde confondu, pour le Brexit: voici enfin le départ de l’empêcheur de tourner en rond! Tout ceci est tragique, nous faisons fausse route. L’idéal européen ne se conçoit que dans un équilibre entre les Nations européennes. Le triangle, France, Angleterre, Allemagne, est au centre de cet équilibre.  La France, historiquement culturellement, est au carrefour de multiples traditions: germanique, certes, mais aussi italienne, polonaise, espagnole, portugaise, britannique, russe, etc… Se résoudre à une soumission non dite à l’Allemagne, voilée derrière les coups de mentons et les roulements de mécanique, n’est pas seulement un crime, c’est une faute. La richesse de l’Europe ne se conçoit que dans un climat d’équilibre et d’égalité. La domination ou la suprématie d’une nation sur les autres est la voie royale vers la révolte, la déflagration et la désintégration. Quand je parle d’une nation ou quasi-nation européenne, c’est l’image qui compte: un ensemble de peuples unis par l’histoire et la culture, grecque, latine, chrétienne, la Renaissance et ses suites, et dont l’avenir se joue face à un monde qui comptera bientôt 11 milliards d’habitants, des menaces effroyables, démographiques, terroristes, économiques, migratoires, environnementales, l’émergence de géants politiques planétaires. Il est évident qu’il faudra s’unir pour relever ces défis. Mais dans un climat d’aveuglement sans nom, l’Europe, guidée par le renoncement, dont chaque jour offre une nouvelle illustration, marche en ce moment aux déchirements et à l’abîme.

Maxime TANDONNET


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Author: Redaction