Ne touchez pas au participe passé!

Un mouvement d’opinion a vu le jour dans l’objectif de simplifier la règle d’accord du participe passé. Né en Belgique, il s’étend aujourd’hui en France.

Deux anciens professeurs de français écrivent dans Libération du 2 septembre:« Osons l’affirmer : les règles d’accord du participe passé actuelles sont obsolètes et compliquées jusqu’à l’absurde. [Les nouvelles règles proposées d’accord simplifiées] compte tenu du fait qu’elles ne sont pas fautives, qu’elles suivent l’usage, qu’elles libèrent du temps scolaire, qu’elles sont recommandées par toutes les instances officielles d’avis sur la langue et les universités, on est en droit de se demander pourquoi ces [nouvelles] règles ne sont pas appliquées. »

Nous voyons bien la logique qui est derrière ce raisonnement. D’abord, celle de la table rase: en finir avec une vieille règle grammaticale venue du passé qui complique l’orthographe du français. Les auteurs de cet article effectuent un rapprochement révélateur entre les règles d’accord du participe passé et la religion chrétienne. Ensuite le nivellement par le bas: puisque cette règle crée une inégalité sociale entre les personnes qui la maîtrisent et celles qui peinent à l’appliquer, il suffit d’y mettre fin pour rétablir l’équilibre. Une vision strictement inverse de celle des premiers républicains qui voyaient dans l’exigence scolaire un tremplin de la promotion sociale.

On en revient à l’éternelle question de la simplification de l’orthographe. Jusqu’à présent, les réformes ont porté sur l’écriture des mots. Aujourd’hui, un cran supplémentaire est franchi: on touche à un pilier grammatical, à la structure même de la langue. « Les fleurs que je t’ai offertes … »

De fait, les règles d’accord du participe passé avec les verbes être et avoir ne sont pas arbitraires. Elles ont une histoire qui remonte aux sources latines du français. Elles constituent une richesse, une subtilité de la langue. Les supprimer serait, non pas une simplification, mais un appauvrissement du français.

L’apprentissage des règles d’accord du participe passé relèvent d’une sublime gymnastique de l’esprit et de la construction intellectuelle d’une personne. La logique de la simplification à tout prix conduit à la destruction du patrimoine intellectuel: à quoi sert le subjonctif? Et la grammaire en général? et les mathématiques? Et la philosophie? Et l’histoire? toutes ces disciplines si compliquées.

Mais au fond, cette idéologique de la simplification à tout prix, qui s’exprime dans ce débat, n’est-elle pas l’un des sous-bassement du monde moderne? Plutôt que de pousser les personnes à s’élever par le savoir et la culture en surmontant les difficultés de l’apprentissage, il suffirait de supprimer ces dernières pour assurer un strict égalitarisme entre tous les hommes.  Il est sidérant de voir comment les vieilles idéologies qui ont provoqué tant de malheurs resurgissent sous des formes les plus anodines et innocentes.

Maxime TANDONNET

 

 

Author: Redaction