Le Gouvernement a saisi le Conseil d’État d’un projet de loi pénal renforçant la lutte contre le crime organisé et son financement dont les grandes orientations ont été présentées par la garde des Sceaux en Conseil des ministres et par le Premier ministre devant la presse le 23 décembre 2015.
Ce projet de loi vient conforter l’État de droit car il consolide la place de l’autorité judiciaire et du droit dans notre démocratie au moment où elle subit de violentes attaques. C’est la condition essentielle d’une réponse sans concession, inscrite dans la durée, à la menace terroriste.
Annoncé dès le début de l’année 2015, il a été longuement muri par la chancellerie. Il s’est nourri des réflexions collectives conduites par les procureurs généraux Nadal et Beaume, ainsi que des consultations menées avec les services de police, de gendarmerie et les syndicats et organisations professionnelles. Il a été enrichi par les mesures de lutte contre le financement du terrorisme, fruit elles-aussi de réflexions et de concertations organisées par le ministère des Finances. Enfin, sept dispositions nouvelles sur les 34 articles que compte ce texte, ont été insérées sur proposition du ministre de l’Intérieur.
Ce projet de loi étend les pouvoirs conférés aux procureurs et aux magistrats instructeurs. Ces nouveaux outils juridiques donnés à la magistrature sont la suite naturelle des moyens sans précédent accordés depuis 2012 notamment dans le cadre du second plan de lutte contre le terrorisme. Ainsi 2500 postes supplémentaires ont été créés, dont 1175 pour les seuls services judiciaires. Après avoir renforcé l’indépendance des parquets avec la loi du 25 juillet 2013, le gouvernement entend renforcer leurs moyens opérationnels afin de garantir une véritable direction de la police judiciaire. Le Gouvernement entend aussi doter la magistrature de techniques d’enquêtes équivalentes à celles conférés aux services de renseignement afin de faciliter un traitement judiciaire efficace des informations essentielles à la lutte contre le crime organisé.
En outre, de nombreuses dispositions, déjà insérées dans ce texte ou pour lesquelles le Gouvernement sera habilité à légiférer par ordonnance, visent à simplifier les enquêtes pénales et accroitre les garanties des justiciables et les droits de la défense. Les enquêtes du Parquet seront désormais conduites à charge et à décharge. Les nouvelles mesures d’investigation accordées par ce texte au Parquet seront soumises à l’autorisation du juge des libertés et de la détention.
Enfin, les pouvoirs de contrôle d’identité limités dans le temps, dans l’espace et au seul domaine de la lutte contre le terrorisme désormais conférés au préfet seront soumises au contrôle de l’autorité judiciaire dûment avisée. Il en sera de même pour l’extension de la retenue de quatre heures par les forces de sécurité aux situations nécessitant un examen approfondi.
Les dispositions instaurant un contrôle administratif de toute personne ayant quitté le territoire national pour accomplir des déplacements à l’étranger en vue de participer à des activités terroristes restent sous le contrôle du juge administratif.
Concernant l’assignation à résidence administrative, le gouvernement, conformément à l’avis rendu par le Conseil d’Etat le 17 décembre 2015, a veillé à concilier l’atteinte à la liberté d’aller et venir avec les exigences d’une vie professionnelle et familiale, comme à organiser un degré de contrainte moindre que celle prévue par l’article 6 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence.
Ce texte est désormais soumis à l’examen du Conseil d’Etat, avant son adoption en Conseil des ministres, début février, et sa présentation au Parlement.