Nous sommes arrivés à un stade où la parole politique souffre d’un discrédit absolu. Non seulement les Français ne croient plus personne mais ils n’écoutent plus rien. Quand le président Hollande déclare, comme hier soir, « Qu’est-ce que j’ai fait depuis des mois en France si ce n’est prendre des décisions[…] Chaque fois que j’ai à prendre une décision, je la prends » sur un mode incantatoire qui rappelle Paul Reynaud le 28 mai 1940, alors que les chars allemands déferlent sur le pays « Je crois au miracle car je crois en la France », il ne réalise sans doute pas l’effet contre-productif de ces mots, tellement décalés, pour son image personnelle, pour celle du chef de l’Etat. De même, les chaînes de télévision nous accablent du matin au soir de misérables et pitoyables débats, mêlant leurs experts attitrés et des politiciens de tout bord avec une prédilection hypocrite pour les soi-disant « anti système». Tout ce petit monde, de l’extrême gauche à l’extrême droite, en passant par les centres, qui polémique, caquète pour ne rien dire, postillonne ses éléments de langage, nous inspire un fantastique sentiment de ridicule. « Rien ne rehausse l’autorité mieux que le silence, splendeur des forts et refuge des faibles, pudeur des orgueilleux et fierté des humbles, prudence des sages et esprit des sots. Pour l’homme qui désire ou qui tremble, le mouvement naturel est de chercher dans les mots un dérivatif à l’angoisse. Parler d’ailleurs, c’est délayer sa pensée, épancher son ardeur, bref, c’est se disperser quand l’action exige qu’on se concentre […] En fait, aucun de ceux qui accomplirent de grandes actions ne les ont dirigées dans le bavardage ». Charles de Gaulle, Le fil de l’épée. Et si la reconquête du pouvoir, de l’autorité, du sens de l’action, passait d’abord par le silence ?