La vie politique nationale, médiatique, sombre dans le néant et dans le ridicule. Nous sentons bien cet effondrement de l’espérance politique, cette absence de toute perspective crédible à l’horizon, à travers de multiples signes.
- Sa division en deux camps, voire trois, qui se vomissent mutuellement, ne s’adressent l’un à l’autre que pour s’insulter, se déchirer, s’accuser. Ce principe de sectarisme haineux relève d’ailleurs de la pure de l’imposture. Il faut faire semblant de s’entretuer quand on n’a rien dire, rien à proposer. Cela ne les empêche pas de s’embrasser quand ils se retrouvent dans l’ombre. Jadis, le but ultime de la politique, son objectif absolu était "l’unité des Français". Aujourd’hui, les "politiques" paraissent se complaire dans la haine et la division qu’ils cultivent.
- La dérive mégalomaniaque de la politique nationale, médiatique, accaparée par des prédateurs, dans l’ensemble indifférents au bien commun, à l’intérêt général, avec pour seule et unique perspective celle de pavoiser un jour sur le perron de l’Elysée en bombant le torse. Parfois, en les voyant à l’écran, on se dit qu’il ne font même plus semblant de prendre les gens au sérieux.
- L’anomie généralisée, la perte des repères, en l’absence de valeurs, de code de l’honneur, tous les retournements de veste, tous les mensonges, les excès, les tartufferies et les mauvais coups sont permis. Nous le voyons dans la banalisation du lynchage et de la délation, la dissimulation, le règne de la "posture".
- L’absence d’objectif, de sens à la politique. Jadis, disons jusqu’à la fin des années 60, toute l’action publique tendant vers un objectif : la France, la patrie. Qu’est-ce qui compte aujourd’hui ? L’humanité ? L’environnement ? L’Europe ? Ceux qui prononcent le mot France avec des trémolos dans la voix n’y croient pas un instant, pas plus que les autres. Qu’est-ce qui compte ? l’ego, « moi-je », ma bobine sur les médias.
- La mort de la politique au sens noble du terme, le gouvernement de la cité. Comment maîtriser la dette, combattre efficacement le chômage, mettre fin à la délinquance, contrôler les flux migratoires. D’un gouvernement à l’autre, depuis 1974, avec des rémissions, des périodes de volontarisme sans lendemain, la chute paraît sans fin, ouvrant la voie à la déchéance de la démagogie, au retour des idéologies.
Suis-je exagérément sombre ? Devons-nous désespérer ? Non évidemment. D’abord, il nous reste les richesses de nos vies privées et de nos passions intérieures. Et puis surtout, personnellement, je crois à la force de l’histoire, de gigantesques événements planétaires qui bouleversent la donne, comme un courant océanique, qui parfois s’éveille, emporte tout sur son passage et balaye les petitesses. Charles Péguy fait parler clio, l’histoire : « C’est ici le plus grand mystère peut-être de l’événement, mon ami, c’est ici proprement le mystère et le mécanisme même de l’évènement, historique, le secret de ma force, mon ami, le secret de la force du temps, le secret temporel mystérieux, le secret historique mystérieux, le mécanisme même temporel, historique, la mécanique démontée, le secret de la force de l’histoire, le secret de ma force et de ma domination… » Clio, Dialogue de l’histoire et de l’âme païenne. Voilà qui nous élève bien au-dessus des misères de l’actualité et nous permet de relativiser les turpitudes apparentes du présent. Tout cela, cettte médiocrité ambiante, prendra fin un jour, sera tôt ou tard balayé par la "force de l’histoire".
Maxime TANDONNET