L’ordre idéologique

photoLe diable se cache derrière les détails. Il est des anecdotes plus révélatrices que les grandes démonstrations. Le Figaro des 8 et 9 novembre publie un article discret sous le titre « Mon nom est Zampa ». « Mardi 4 novembre, nous nous sommes présentés au Gaumont Champs-Elysées pour assister à la projection pour la presse du film « French« [...] Las, à l’énoncé de notre nom, la préposée à l’accueil haussa les sourcils [...] Appelée en renfort, sa responsable nous signifia que notre présence était indésirable. La maison Gaumont a en effet mis son veto à la venue de tout critique du Figaro [...] Gaumont nous reproche notre liberté d’opinion et peut-être aussi l’insolence de nos mises en scènes [...] Le mois dernier, tandis qu’Omar Sy, sûr de ne trouver en face de lui que des micros complaisants, écumait les plateaux de télévision et de radio pour assurer la promotion de Samba, nous avons eu l’audace d’y mettre un sérieux bémol. Aïe, aïe, aïe! Les producteurs de cette fable sur les sans papiers n’apprécièrent pas. Incorrigibles humanistes, ils nous punissent en nous bannissant » La liberté se détricote par le bas, au jour le jour, dans la banalité du quotidien. Interdire à des journalistes de faire leur travail pour avoir émis une simple opinion qui diverge de l’idéologie dominante, celle du monde médiatique, c’est entrer dans une logique totalitaire. Etrange ambiguïté: en vertu d’une oeuvre qui célèbre, semble-t-il,  la pureté angélique, on s’en prend à une des libertés les plus fondamentales, la liberté de la presse. Cette petite gifle discrète à un principe démocratique, au nom d’une ligne idéologique, n’a d’ailleurs indigné personne. On imagine le tollé – légitime - si un journaliste du Monde ou de Libération avait été ainsi refoulé à l’entrée d’une séance destinée à la presse en représailles pour un commentaire critique… Cette « France d’en haut » ne manque jamais de surprendre chaque jour davantage. Elle ouvre le champ de la libre expression à des pensées obscures que l’on croyait à jamais éradiquées, en laissant faire la création (paraît-il) d’un parti politique ouvertement antisémite. Mais elle interdit à la presse modérée de faire son travail le plus routinier, le plus évident et ne supporte pas le moindre signe de discordance, même sur une affaire de goût… Le paradoxe n’est qu’apparent. Tout se passe comme si elle tendait subrepticement à ne laisser de choix qu’entre deux alternatives: la soumission inconditionnelle à l’ordre idéologique ou le rejet dans l’abîme extrémiste le plus immonde.

Maxime TANDONNET


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Author: Redaction