Union nationale, disiez-vous?

Les comparaisons ne manquent pas pour qualifier la crise du coronavirus. La débâcle de 1940 revient souvent. D’autres évoquent la guerre de 1914-1918 pour en appeler comme le président Poincaré à l’Union sacrée. Comparaison n’est pas raison. A la guerre, le peuple est mobilisé pour aller se battre. Des millions de jeunes gens sont arrachés à leur maison pour combattre au front et faire le sacrifice de leur vie. En ce moment, la situation est inverse: « restez chez vous! » La guerre de 1914-1918 a fait 1,5 million de morts en France, 1,5 million d’infirmes, 20 millions de tués au total. Celle de 1939-1945, 400 000 morts français, 50 millions au total. Nous en sommes loin… Quant à l’union nationale, contrairement au message bien-pensant asséné depuis des mois, elle n’implique pas de taire les critiques envers les autorités politiques, pas plus en 1914-1918, qu’ aujourd’hui. Sous la Grande Guerre, le gouvernement subissait mille critiques et assauts quotidiens. Ainsi, au Sénat, Georges Clemenceau, le Tigre,  n’avait de cesse que d’interpeller – violemment – les gouvernements sur la conduite des opérations jusqu’à son arrivée au pouvoir le 16 novembre 1917. Ses critiques virulentes, parmi d’autres critiques,  bousculaient la routine et forçaient les pouvoirs publics à se remettre en question. Après l’offensive de Nivelle au Chemin des Dames, le 16 avril 1917, annoncée comme décisive, mais ayant tourné au désastre et une sanglante hécatombe, fallait-il se taire en vertu de l’union nationale?  Aujourd’hui, tout Français a le droit, ou le devoir de s’interroger. Les gens qui sont à la tête du pays leur ont promis de grandes choses, il y a bientôt trois ans: « un nouveau monde », « le renouvellement », « la transformation de la France » et sa « refondation ». Or, nous les découvrons incapables, en trois mois de crise de coronavirus, de fournir des masques protecteurs à la population. Il faudrait applaudir? Désormais, fautes de masques, ils vont nous vendre leur « jour d’après » ou leur « monde d’après« . Serons-nous obligés de les croire? L’unité nationale signifie aujourd’hui solidarité indéfectible d’un peuple autour des plus exposés parmi les siens: le personnel médical, les médecins, les sapeurs-pompiers, les caissières de magasins et les livreurs. Il implique une profonde compassion et générosité envers les familles des victimes et les malheureux foudroyés par la crise, artisans, restaurateurs, commerçants et salariés licenciés. En revanche, l’union nationale ne signifie en aucun cas, pas plus aujourd’hui qu’hier, une obligation de servilité, de naïveté ou d’obséquiosité.

Maxime TANDONNET

NB: je remercie de tout cœur les auteurs de commentaires. Je les lis tous et toujours avec la plus grande attention et beaucoup sont une source précieuse d’enrichissement de ma propre réflexion et d’inspiration quotidienne. Leur clarté, leur lucidité, leur franc-parler associé à la modération du ton, sont une lueur d’espérance à travers le brouillard de la médiocrité où nous sommes plongés.  L’augmentation de leur nombre, proportionnelle à celle de la fréquentation de ce blog, me rend hélas difficile la tâche d’y apporter une réponse systématique mais cela n’enlève rien à l’intérêt profond que je trouve, comme beaucoup de monde, dans leur lecture.  

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Author: Redaction