Syrie, angélisme et politique des réalités

les-djihadistes-ont-pris-le-qg-des-forces-kurde-kobaneL’une des clés de la sortie de crise au Moyen-Orient et de la victoire contre l’Etat islamique Daesh se joue en Syrie. Les dirigeants occidentaux font une fixation sur Bachar El-Assad et excluent, contrairement à la Russie, de le soutenir temporairement pour vaincre le chaos génocidaire qui se répand. Ils semblent préférer les massacres en cours, les tueries massives de femmes et d’enfants, les égorgements de villageois, les supplices infligés aux prisonniers, les destructions du patrimoine de l’humanité commise par l’Etat islamique en pleine expansion, les vagues de millions de réfugiés, à un éventuel et temporaire appui stratégique au dictateur syrien, pourtant de toute évidence le dernier rempart avant la chute de Damas. Ce dernier est en effet accusé du  massacre d’au moins 200 000 personnes. Le raisonnement actuel des dirigeants occidentaux ressemble à s’y méprendre à celui d’une partie de la bourgeoisie européenne en 1936-1940 qui refusait de choisir entre Staline et Hitler, considérés  comme deux monstres de niveau équivalent. Or, pour des raisons de réalisme, de rapport de force, de nécessité de la guerre, les démocraties, Roosevelt, Churchill, de Gaulle, se sont alliées avec Staline pour vaincre l’Allemagne nazie. Les crimes de Staline? Lancée le 27 septembre 1929, la « dékoulakisation » des campagnes russes, sous la forme de déportations massives en Sibérie et d’exécutions sommaires fait 18 millions de morts. Au milieu des années 1930, la famine en Ukraine, organisée par Staline, provoque 4,5 à 7 millions de morts. Les purges de la fin des années 1930, dans l’armée et les administrations entraînent 700 000 morts. La déportation de 1,7 million de Polonais, le massacre de Katyn (22000 morts). Pourtant, pour gagner la deuxième guerre mondiale, il a bien fallu s’allier avec l’un des pires criminels de l’histoire. Et c’est l’Armée Rouge, avec ses 17 millions de tués, qui a brisé la Wehrmacht et le national-socialisme. Avec le raisonnement actuel des dirigeants occidentaux, il va de soi que la guerre contre le nazisme eût été perdue. C’est toute une conception du pouvoir qui est en cause: l’image narcissique et la posture prennent le pas sur le gouvernement des réalités, l’intérêt public et les rapports de force: ne pas salir son beau reflet dans le miroir médiatique.  S’il faut s’allier provisoirement avec le dictateur syrien pour résister à la progression du Daesh et éviter la chute de Damas, puis vaincre l’Etat islamique, il serait totalement irresponsable, d’une bêtise et d’une lâcheté innommables, de rejeter cette option.

Maxime TANDONNET


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Author: Redaction