Sondage présidentielles, le grand flou (pour Atlantico, avec M. Bruno Cautrès))

En vérité, les nouvelles ne sont vraiment bonnes pour personne. La première place de Mme le Pen avec 26% des intention de vote est en trompe-l’œil. Déjà, en 2010-2011, des sondages de premier tour la donnaient en tête (devant M. Strauss Kahn) avec un score de ce genre. En dix ans, rien n’a changé. Cet immobilisme du niveau des intentions de vote en sa faveur est stupéfiant et témoigne d’une impressionnante stagnation de son potentiel électoral, malgré le contexte délétère qui devrait profiter à un parti protestataire. Avec 26% au premier tour, une victoire de Mme le Pen au second tour est quasiment impossible. Elle ne dispose d’aucune réserve de voix, ni chez les électeurs de M. Bertrand ou Mme Pécresse, et encore moins à gauche. La dédiabolisation est largement factice et le plafond de verre plus solide que jamais malgré une impressionnante exposition médiatique. Quant au président Macron, oui, 24% peuvent suffire à le faire réélire mais c’est un score médiocre pour un chef de l’Etat en fonction, qui témoigne d’un haut niveau de défiance touchant les trois/quarts de l’électorat. L’effet légitimiste dont il devrait bénéficier dans le contexte d’une crise sanitaire épouvantable, semble ne jouer qu’à la marge. Ce niveau de 24%ne garantit en rien le succès (sauf s’il est opposé au second tour à Mme le Pen). Au premier tour de 2012, le président Sarkozy faisait 27% et il a perdu au second.

  • La candidature d’Anne Hidalgo ne convainc pas, le RN monte mais n’explose pas et Macron stagne : existe-t-il un chemin pour permettre à la droite de se qualifier pour le second tour de la présidentielle?

Tout d’abord, il est essentiel de comprendre que rien n’est joué d’avance. Depuis 2017, le monde a été bouleversé par la crise du covid-19. Tous nos repères ont été balayés. En outre, une vertigineuse crise financière et économique se profile à l’horizon, un séisme dont nul ne peut encore prévoir les conséquences politiques. Dans ce contexte de chamboulement radical de la société, l’anomalie, ce serait, cinq ans après, un parfait statu quo électoral et la reproduction à l’identique du scénario de 2017. D’ailleurs, historiquement, chaque élection présidentielle réserve des surprises de premier tour par rapport aux pronostics. De fait, tout peut basculer extrêmement vite. Le meilleur candidat de droite dans ce sondage, M. Bertrand, est à 16%. Si un candidat de droite parvient à gagner 5 points sur l’un des deux co-leaders de ce sondage, la donne électorale se trouve profondément transformée. Or, une partie de l’électorat de droite qui soutient encore Macron (environ un quart de cet électorat), n’attend que la présentation ou l’officialisation d’une candidature crédible à droite pour revenir au bercail. Rien n’assure que cela va se produire, mais rien ne permet non plus de l’exclure. En langage sportif, la droite est en position d’outsider pour le premier tour. En quinze mois, tout est possible, tout est ouvert. D’autant plus que selon d’autres sondages, 80% des Français ne veulent en aucun cas d’un nouveau duel Macron-le Pen. Au fond, il suffirait que l’électorat se mette en cohérence avec lui-même pour balayer cette perspective.

  • Les hypothèses Pécresse et Bertrand ne semblent pas fédérer autant que la candidature de François Fillon en 2017. Si la droite veut l’emporter, quel type de candidat doit-elle mettre en avant ? Qui peut réellement porter les espoirs de LR ?

Dans le pays domine une gigantesque défiance face au politique, le sentiment que les politiques ont fait naufrage dans la vanité et les calculs personnels au détriment du bien commun. Les Français ont le sentiment de vivre une ère de grande mystification ou tout n’est que manipulation, posture, communication au détriment de l’action au service de l’intérêt général. L’enjeu, pour un candidat de droite, c’est de trouver les paroles et les gestes qui permettent de restaurer un lien de confiance avec la nation. Il doit réussir à convaincre qu’il se positionne en serviteur de la vérité et du pays et non en demi-dieu narcissique. Il lui incombe de persuader une majorité de Français de sa volonté de toute mettre en œuvre pour apporter des réponses aux préoccupations et aux souffrances des citoyens, en matière de chômage, de pauvreté, de services publics, de démocratie, de sécurité ou de maîtrise des frontières. On ne gagne jamais une élection présidentielle sur la précision et l’exhaustivité d’un programme, mais sur une image, une sensation collective, une ligne générale plutôt qu’une plate-forme détaillée. C’est le mot confiance qui est au cœur de la reconquête.

 

 

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Author: Redaction