Réfléchir à la guerre Russie-Ukraine

Attention! Le sujet fait l’objet d’un tabou absolu, pire que tout autre. En parler est s’exposer à un invraisemblable vent de haine ou de mépris et aux insultes: poutiniste, défaitiste, collabo, etc. L’idée, ici, est juste d’essayer de réfléchir – avec le cerveau – sans prétendre détenir la vérité. Les lecteurs ulcérés par le texte ci-dessous sont cordialement invités à y répondre par des arguments plutôt que des cris d’indignation.

Toutes les guerres finissent un jour. Et celle-là aussi finira. la question est comment? Les pays occidentaux, l’OTAN tiennent pour l’instant une position paradoxale. Ils disent, on ne fait pas la guerre à la Russie, mais ils livrent des chars à l’Ukraine. A quel moment s’effectue la bascule dans une participation active à la guerre? Quand ils enverront aussi des soldats – avec les chars. Pour l’instant, ils l’excluent absolument. La perspective d’Américains ou Européens tués sur le champ de bataille en Ukraine et en Russie se présente, à ce stade, comme une limite infranchissable. Mais jusqu’où cette position est-elle tenable? Si l’envoi de chars ne suffit pas à mettre à genou la Russie (qui en a vu d’autres dans l’histoire), les occidentaux pourront-ils se cantonner dans le nous ne faisons pas la guerre à la Russie. En effet, il ne suffit pas d’envoyer des armes, même en quantité et en qualité – il faut aussi les qualifications pour les utiliser et suffisamment d’officiers et de soldats pour en faire un usage gagnant. Jusqu’où ce paradoxe – faire la guerre sans faire la guerre (ou la faire indirectement avec le seul sang ukrainien) est-il tenable?

Par ailleurs, le discours occidental sur la Russie de Poutine est d’une grande fermeté. Il est question de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité, d’un Etat terroriste et de comparaisons fréquentes avec l’Allemagne hitlérienne de la Deuxième Guerre Mondiale. Mais dans ces conditions, pourquoi les Etats occidentaux maintiennent-ils des ambassades en Russie et conservent-ils des ambassades russes dans leurs capitales (Paris, Londres, Washington, etc.)? Double-langage. Soit on a affaire à un Etat absolument infréquentable, à une guerre totale, sans autre issue que l’écrasement, et la rupture doit être totale, soit on maintient des ambassades, mais cela signifie qu’on envisage une possible reprise du dialogue. Il faudrait là aussi accorder les faits aux paroles ou inversement.

De même, le but de guerre (qui s’exprime dans de nombreux discours des occidentaux) est aujourd’hui la victoire de l’Ukraine et le jugement des criminels de guerre devant une cour internationale. Mais de quelle victoire parle-t-on? Une reconquête par les armes des territoires perdus du Donbass et de la Crimée suivie de la chute du régime criminel de Poutine et de l’arrivée au pouvoir d’un aimable gouvernement pro-occidental qui assumerait la défaite et livrerait les criminels de guerre à une cour internationale? Ou bien une victoire totale de l’Ukraine: effondrement de l’armée russe et invasion de la Russie par l’armée Ukrainienne avec des armes occidentales qui irait jusqu’à Moscou chercher les criminels de guerre? On est bien en droit de trouver ces deux scénarios hautement improbables, méconnaissant l’histoire, la réalité du rapport de force, la psychologie des peuples et la situation interne de la Russie.

De vérité, il existe deux issues possibles ou crédibles à cette abominable guerre fratricide. La première: à un moment donné, devant l’impasse, l’absence de solution militaire et la lassitude face aux fleuves de sang versés et aux destructions, l’ouverture de négociations bilatérales pour la recherche d’un accord par voie diplomatique. La seconde: l’entrée en guerre directe des armées de l’OTAN contre la Russie incluant des combats terrestres et aériens, des pertes considérables, les bombardements de Moscou et de villes russes suivis de représailles et le risque évident d’escalade nucléaire et d’anéantissement ou destruction partielle de la civilisation gréco-latine et chrétienne au profit d’autres civilisations (chinoise, indienne, islamique). Le problème c’est que la Russie, plus vaste pays de la planète, peuplé de 200 millions d’habitants au nationalisme exacerbé et première puissance nucléaire, n’est pas la Serbie ni l’Irak… Les deux issues sont possibles, la première comme la seconde. Et l’histoire de l’humanité toute entière est là pour prouver que la seconde n’a rien d’illusoire.

MT

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Author: Redaction