Politique: réponses à Atlantico

imagesX99ST09NCi-dessous, mes réponses au site d’information Atlantico, qui m’interrogeait hier soir sur les derniers développement de la politique française. Ce que je ressens est un immense malaise. Le glissement de la politique française toujours plus loin dans le grand spectacle, la personnalisation à outrance, les batailles d’ego boursouflés. Au même moment, la France sombre dans le chaos et personne n’a la moindre réponse crédible à apporter. Faut-il le préciser, les candidats supposés anti-système, aux deux extrêmes (droite comme gauche) sont à mes yeux la quintessence du système axé sur la personnalisation outrancière de la politique, camouflage de la chute dans le néant. Mais en toute confidence aux visiteurs et participants à ce blog: je sais avec une totale certitude que ce que j’écris est la vérité, mais paradoxalement, n’exclus pas du tout d’être moi-même l’idiot du village, totalement à côté de la plaque. Allez comprendre la contradiction…

Maxime TANDONNET

QUESTIONS :

1) Ce mercredi soir, Nicolas Sarkozy tiendra un meeting près de Lille, après avoir inauguré le nouveau siège des Républicains dans cette ville. Quelle importance lui donne-t-il ?

Les grands moyens déployés pour ce meeting de Lille montrent à l’évidence que M. Sarkozy a choisi d’accélérer l’entrée en campagne. Deux éléments déclencheurs peuvent expliquer cette montée en puissance soudaine: les derniers sondages, qui dénotent une remontée, et les critiques de plus en plus nombreuses qui l’invitent à clarifier ses objectifs. Chez Nicolas Sarkozy, les meetings en période préélectorale ont toujours une importance considérable. En effet, l’ancien président de la République est avant tout un rhéteur, qui aime sentir le contact avec la foule et semble en tirer une force. Il s’éloigne des discours qui lui sont préparés et improvise comme s’il s’adressait à une personne à travers l’auditoire de ses meeting. Ce mode de communication pour lancer une campagne est chargé de sens: il s’adresse au peuple et non aux élites. Le choix de Lille est aussi significatif, le Nord est un lieu qui a particulièrement souffert du chômage, de la désindustrialisation. Le Calaisis avec ses problèmes d’immigration n’est pas loin. Le président Sarkozy choisit donc un angle d’attaque bien précis. Il s’apprête à faire une campagne droitière et sociale, sur les thèmes de la nation, de la sécurité, des frontières, du peuple qui souffre. En cela, il veut clairement se démarquer des approches libérales de ses concurrents.

2) Au regard des moyens déployés, peut-on imaginer que ce meeting soit l’occasion pour l’ancien Président d’annoncer sa candidature à la primaire de la droite et du centre, comme tous ses rivaux le pressent ces jours-ci de le faire ? Et s’il ne l’annonce pas officiellement, cette réunion publique ne signera-t-elle pas néanmoins sa véritable entrée en campagne ?

La question de l’annonce officielle semble secondaire. La tenue d’un tel meeting signifie de toute évidence qu’il est candidat à la primaire. Va-t-il l’annoncer officiellement ce soir? Ce n’est pas certain. Une telle déclaration l’obligerait sans doute à démissionner de son poste de président des Républicains. Or, de son point de vue, il n’a pas terminé sa tâche dans cette fonction, notamment celle de la rédaction d’un projet de campagne. Les rumeurs sont contrastées sur la date de son entrée en campagne et de son départ de la présidence des Républicains. On a parlé de juillet, puis de la fin de l’été. L’expérience de 2007 comme de 2012 montre qu’il n’aime pas réagir sous la pression, cherche aussi l’effet de surprise. Elle montre qu’il préfère attendre le plus longtemps possible avant de devenir officiellement candidat mais que cela ne l’empêche pas d’agir en candidat.

3) Ce mardi, Marine Le Pen a déclaré dans un entretien à L’Opinion qu’Alain Juppé « sera le candidat » des Républicains à la présidentielle de 2017, et qu’un duel entre elle et lui serait « sain ». Ne fait-elle pas là un calcul erroné, alors que même Jean-Luc Mélenchon déclarait dimanche dernier : « Le plus dangereux car le plus déterminé, c’est Nicolas Sarkozy » ? Qu’a-t-elle à perdre du fait de cette erreur de jugement ?

Il est tout à fait vrai que Mme Le Pen et M. Juppé sont deux candidats aux antipodes l’un de l’autre, par leur génération, leur parcours politique, leur expérience, leurs idées. Sur l’Europe, la mondialisation, le libéralisme, tous les oppose de manière presque caricaturale. Cependant, on ne voit pas bien ce qu’un tel duel aurait de « sain ». Les Français ne sont pas forcément en quête d’un affrontement de points de vue extrêmes ou d’un duel binaire entre deux idéologies. Que ressentent-ils à la vue de la personnalisation à outrance de la vie politique et les batailles de chefs? Ce phénomène concourt sans doute, dans l’aveuglement général, au climat de défiance envers la politique qui touche 88% d’entre eux (cevipof). Il est probable que les Français dans leur ensemble préfèreraient que les politiques s’appliquent à rechercher des solutions de bon sens à leurs problèmes. M. Mélenchon trouve-t-il Nicolas Sarkozy « plus dangereux » que M. Juppé? Honnêtement, je suis absolument incapable de dire lequel des deux serait le plus « dangereux » au deuxième tour face à Mme Le Pen ou à M. Mélenchon. En revanche, tout laisse penser que dans une telle hypothèse soit M. Sarkozy, soit M. Juppé, sortiraient largement vainqueur d’un tel duel et pourraient s’installer tout à leur aise à l’Elysée. Mais franchement, ces grands affrontements d’ego, un an avant la présidentielle, ne me paraissent absolument pas à la hauteur de l’attente des Français et des enjeux du monde qui vient.


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Author: Redaction