Siffler et huer la cérémonie du 11 novembre est l’expression même du chaos mental qui submerge notre pays, privé de ses repères historiques et de ses valeurs patriotiques. Voici quelques lignes tirées de mon livre, 1940, un autre 11 novembre (Tallandier 2009) qui évoquent ce que représentait jadis une cérémonie sacrée dans l’esprit d’une jeune Française ou d’un jeune Français :
« Filles et garçons accompagnent chaque année, le même jour à la même heure, leur père et leur mère à l’Arc de triomphe. C’est d’ailleurs la mémoire des morts qui est à l’honneur tout autant que la victoire de 1918. Quelques-uns sont marqués au plus profond de leur conscience par le souvenir de leur père, ses décorations à la poitrine, droit comme un chêne et ému aux larmes au moment de la sonnerie aux morts. À qui, à quoi pouvait-il bien songer à ce moment précis : à ces deux frères bien-aimés, fauchés l’un à Verdun, l’autre au chemin des Dames, à ce camarade disparu dans la Somme, au souvenir de ces années de souffrances indescriptibles dans les tranchées ? La cérémonie fait partie de leur identité, de leur personnalité, comme l’explique Jacques F : « La cérémonie du 11 novembre se mêlait dans mon inconscient à l’image de mon père qui m’y emmenait chaque année ; elle avait toujours été un moment de communion intense entre lui et moi. À la pensée de mon père absent, une force mystérieuse me poussait à me rendre à l’Étoile en ce 11 novembre 1940 comme tous les 11 novembre avec lui».
Siffler la cérémonie du 11 novembre est un outrage à la conscience nationale, un sacrilège au regard de notre identité, de notre histoire. Mais la responsabilité de cet état de fait est largement partagée : un monde médiatique qui cultive la violence verbale et la vulgarité agressive, une classe politique actuelle lamentable, de A à Z, sans exception, aveugle et irresponsable, le naufrage de nos institutions publiques. Le résultat de cette effroyable débâcle de la France officielle, visible, c’est le spectacle honteux d’un 11 novembre sous les sifflets. Jusqu’où cette incroyable plongée dans l’abîme peut-elle se prolonger ?
Maxime TANDONNET
