Légalité et légitimité

Les déclarations du président du Sénat mettant en question la légitimité présidentielle issue d’une « non campagne » ont entraîné une surenchère de cris offusqués. Ils s’expliquent par une confusion entre deux notions bien distinctes: légalité et légitimité. On en revient toujours au problème de la vacuité intellectuelle des prétendues élites dirigeantes, devenues incapables de différencier les deux. Légal veut dire conforme à l’ordonnancement juridique, autrement dit à la règle de droit. Légitime signifie tout autre chose: reconnu, accepté comme valable par une majorité. Une élection peut-être parfaitement conforme à la légalité – elle respecte les règles de droit – mais douteuse sur le plan de la légitimité, dans la mesure où un grand nombre de citoyens estiment qu’elle s’est déroulée dans des conditions qui ne leur a pas permis de se prononcer en toute connaissance de cause. Mettre en cause la légalité d’une élection qui s’est inscrite dans le respect de la règle de droit est une attitude pouvant être en effet qualifiée de factieuse. En revanche, soulever la question de sa légitimité n’a rien de scandaleux mais relève du constat factuel. M. Larcher a donc voulu dire que l’occultation des débats sur le bilan du dernier quinquennat (dette publique, chômage, pauvreté, violence, migrations, déclin scolaire, désindustrialisation etc.) de même que l’absence d’une réflexion et d’un véritable choix d’avenir, risquaient de compromettre la légitimité du futur locataire de l’Elysée (et non la légalité de son élection). Il mettait ainsi en question la nature même du régime – non pas la Constitution de 1958 en soi mais le fonctionnement d’un système. Quand l’ivresse narcissique se substitue – avec la complicité servile d’une partie de la population et des prétendues élites – au débat d’idées sur l’avenir de la nation, tôt ou tard, le fondement ou la justification d’un pouvoir même acquis dans le respect de la légalité, risque de se voir dangereusement compromis. Ce phénomène se trouve aggravé dès lors qu’une majorité éprouve le sentiment que le résultat des élections a été faussé par l’assourdissant matraquage sondagier, la pauvreté ou l’indigence des débats de fond, la part prises par les mauvais coups et le cynisme, les conditions inéquitables du déroulement de la campagne… Et alors, le climat de soumission peut basculer très vite dans la révolte, la violence et le chaos. Voilà tout ce qu’il a voulu dire en guise d’avertissement et il avait raison.

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Author: Redaction