Voir le texte complet de Mme Michèle Tribalat ici.
Dans quelques jours, chacun pourra lire le récit du calvaire judiciaire enduré par Georges Bensoussan pendant quatre ans. Ce calvaire commença par une poursuite lancée par le Parquet après un signalement du CCIF, aujourd’hui interdit.
Dans sa préface, Jacques Julliard souligne à quel point ce procès fut, en fait, celui de la clairvoyance, de l’engagement contre l’antisémitisme, de la lucidité et du courage de Georges Bensoussan. Il y dénonce la responsabilité de collectifs d’intellectuels qui chassent en meute. « Fuyez comme la peste les intellectuels de groupe, nous dit-il, c’est-à-dire le plus souvent les lâches et les mouchards » […]
Invité à débattre avec Patrick Weil sur « Le sens de la République », dans l’émission Répliques d’Alain Flinkielkraut diffusée le 10 octobre 2015 sur France Culture, il avait repris, de mémoire, des propos tenus par le sociologue Smaïn Laacher dans un film de Georges Benayoun (Profs en territoire perdus de la République) sur l’incrustation profonde de l’antisémitisme dans l’espace domestique arabe. Smaïn Laacher parlait d’un antisémitisme « déposé dans l’espace domestique [qui] est quasi naturellement déposé sur la langue, déposé dans la langue. Il est dans l’air qu’on respire ». Georges Bensoussan, avait exprimé l’idée à travers la métaphore « téter avec le lait de la mère ».
Quatre jours plus tard, une tribune collective, initiée par Laurence de Cock et publiée sur Mediapart, s’en prit à l’émission d’Alain Finkielkraut et fit semblant d’y avoir entendu l’expression d’« un racisme biologique » et des « paroles haineuses » susceptibles de relever des tribunaux. Le CSA se crut alors obligé d’intervenir et ce fut le début d’un « carnaval de lâchetés et d’abandons » signant la soumission à l’air du temps.
Georges Bensoussan devint alors « un propagandiste anti-arabe » dont son employeur – Le Mémorial de la Shoah – ferait bien, en plus de de lui battre froid, de se débarrasser. La touche perverse consistait à le faire passer pour un digne héritier des pires antisémites français. Rien ne fut épargné à l’authentique pourfendeur de l’antisémitisme d’où qu’il vienne, quand d’authentiques racistes et antisémites font l’objet d’une complaisance médiatique, dès lors qu’ils se mobilisent au nom de l’islamophobie, surtout s’ils peuvent se prévaloir d’être « racisés » comme on dit aujourd’hui (cf. Mehdi Meklat et ses tweets antisémites sous son pseudo Marcelin Deschamp) […]
Mais « l’odeur du sang » ayant attiré la meute, le parquet suivra un signalement du CCIF, dont la constitution de partie civile sera pourtant jugée irrecevable pour ancienneté de l’association insuffisante (ainsi que celle de son poisson pilote, selon l’expression de l’avocat Michel Laval, l’association SOS, soutien Ô sans papiers), lors du jugement en 1ère instance. Cependant, comme les champions de ce type de poursuites judiciaires (LDH, MRAP, SOS Racisme) accompagnés de la Licra, ne voulant pas être en reste, s’étaient aussi portés partie civile, le procès eut bien lieu et aboutit logiquement à une relaxe prononcée le 7 mars 2017.
On retrouva les mêmes parties civiles lors du procès en appel du 29 mars 2018, y compris le CCIF et son poisson pilote, mais avec deux défections : SOS racisme et la Licra dévastée par les querelles internes suscitées par son initiative. Ce procès aboutit, cette fois encore, à une relaxe le 24 mai 2018, après la requalification de l’incrimination par les parties civiles, comme elles en avaient le droit depuis la loi du 27 janvier 2017.
Elles ajoutèrent ainsi, à la provocation à la haine, l’injure et la diffamation en raison de la race et de la religion qui, après l’échec en première instance, pouvaient leur sembler accroître leurs chances de décrocher une condamnation et qui, de toute façon, conduisaient désormais aux mêmes peines (jusqu’à un an de prison et/ou 45 000 euros d’amende). Ainsi, depuis la loi de janvier 2017, quand on a perdu en première instance sur un motif, on peut tenter sa chance en changeant de motif ou en en ajoutant d’autres en appel. Cette requalification de dernière minute avait profondément outré Michel Laval, le défenseur de Georges Bensoussan.
Lors des deux procès, les parties civiles auront joué de tout : racisme biologique par assimilation du lait au sang, accusations de fomenter la division entre juifs et musulmans et d’essentialiser les Arabes… sans parler de l’assimilation de Georges Bensoussan aux antisémites français les plus ignobles. Il fut notamment comparé à Xavier Vallat lors du procès en appel […]
Si la publication des territoires perdus de la République fut étouffée à sa sortie, elle avait fini par trouver ses lecteurs et le titre est désormais devenu une expression courante, malgré les attaques que le livre continue de subir. Mais ce que le procès a révélé, c’est l’hostilité virulente à d’autres écrits de Georges Bensoussan, notamment à son livre sur le triste sort des Juifs en pays arabes. C’est ainsi que l’on vit des avocats se faire historiens pour disqualifier l’historien. Michel Tubiana, en appel, s’interrogea sur « la volonté permanente de destruction d’un lien entre les Juifs et les Arabes » dont serait animé Georges Bensoussan. Michel Tubiana ne veut pas abandonner la jolie histoire d’une vie harmonieuse des Juifs et des Arabes en pays arabes. L’historien qui dévoile la réalité douloureuse de cette cohabitation met en péril son déni confortable. Suivant le bon mot de John Ford, il préfère la fiction à la vérité.
C’est encore le CCIF (accompagné de son poisson pilote), association aujourd’hui interdite, rappelons-le, qui portera l’affaire en Cassation. Des autres associations, ne restera que la LDH, pour sa grande honte. Ce pourvoi sera rejeté le 17 septembre 2019. Même si elles n’ont pas obtenu des tribunaux ce qu’elles attendaient d’eux – la sanctification juridique du déni – perdre, pour ces associations, n’est pas un gros problème puisque, au final, il restera toujours quelque chose de leur suspicion infamante. Elles auront épuisé le moral et les finances de celui qu’elles ont poursuivi et ruiné sa réputation professionnelle et morale, tout en envoyant un message aux imprudents qui se risqueraient à révéler des vérités interdites […] [Extraits d’un résumé ci-joint de Mme Tribalat]