A la veille de l’élection européenne, je n’entends plus à la radio et à la télévision que les mots europhobie, repli nationaliste, et populisme. Au fond, je crois que le monde politique et médiatique jubile en son for intérieur: enfin le retour tant attendu des ténèbres, de la peur, de l’Europe sombre et fascisante, une situation qui lui procure de petit frissons agréables et lui donne l’illusion de se voir en défenseur de la liberté et de la lumière. Moi, je ne cesse jamais de discuter, d’écouter et d’essayer de comprendre les autres, en province lors de mes déplacements ou à Paris. La France d’en haut, jacassante, celle qui a accès à la parole publique me paraît totalement à côté de la plaque. Les Français, dans leur immense majorité, n’ont rien contre l’Europe, l’unité politique et l’amitié fondamentale des peuples européens, bien au contraire. Dans tous les milieux et tous les courants de pensée, ils sont en revanche abasourdis de la débilité du monde politique et médiatique, tous ces vieux noms incarnant l’échec ou les turpitudes qui ressortent de décennie et décennie et qu’on retrouve sans cesse au devant de l’affiche à donner des leçons, cette effarante personnalisation des choses et idolâtrie ambiante (ce matin, les ondes ne bruissent que des noms de DSK et de le Pen!), véritable insulte à l’intelligence, au détriment du débat d’idées, des projets et de la réflexion sur l’avenir. Les Français voient bien leur pays qui s’effondre notamment vis-à-vis de ses grands voisins historiques que sont le Royaume-Uni et l’Allemagne. Je suis désolé de le dire ainsi, mais les gens n’en peuvent plus de se sentir pris pour des cons. La fameuse Constitution de 1793 prévoyait un "droit à l’insurrection" face à l’ignominie quand il n’existe plus aucun moyen institutionnel de se faire entendre. Eh bien l’abstention monumentale attendue dimanche prochain, ce ne sera sûrement pas, en aucun cas, une marque de défiance envers l’Europe, mais un geste insurrectionnel, une gifle des Français, des Européens, à la figure d’un monde politique et médiatique qui les méprise et trahit leur confiance. Je ne dis pas que c’est bien ni efficace, j’essaye de comprendre, c’est tout!
Maxime TANDONNET