Analyse de M. Gérard Araud sur les événements de Washington

La crise d’hystérie médiatique sur les événements américains – l’intrusion de militants trumpistes au Capitole – fait rage. Hier, il n’était question que de « coup d’Etat ». L’interview de M. Gérard Araud, ancien ambassadeur de France à Washington, pour Figaro Vox, ramène ces faits à de plus justes proportions et les analyse avec le recul nécessaire :  « On ne peut pas dire que ce soit une révolution! Il y a eu quelques milliers de gens qui manifestaient – parce que Trump leur a demandé de le faire – et ces derniers ont réussi à pénétrer dans l’enceinte du Capitole, à leur grande surprise. Une fois qu’ils ont été dans le Capitole ils n’ont rien fait, car ils n’avaient ni programme, ni chef. Il faut voir dans ce qu’il s’est passé hier: avant tout, c’est un énorme raté de la sécurité américaine […] Même s’il occupe beaucoup d’espace médiatique, Trump n’est que le symptôme d’une crise plus profonde. Son génie a été de comprendre en 2016 l’existence d’un malaise américain que personne n’avait vu venir, car les résultats macro-économiques à la fin du mandat d’Obama étaient bons. Il a su parler aux oubliés, et son génie fut aussi d’arriver à continuer à être leur voix durant son mandat sans être récupéré par les républicains «classiques» qui pensaient pouvoir le manipuler. Cette rébellion est toujours là, et restera. Il y a un tiers des Américains qui pensent que l’élection leur a été volée. C’est là la poursuite d’une guerre civile américaine que nous connaissons depuis quatre ans. »

Les Etats-Unis, comme le monde occidental, sont frappés par une vertigineuse crise de la démocratie. Depuis quatre ans, M. Trump fait figure, aux Etats-Unis mais dans tout dans le monde occidental de bête infâme du monde médiatique qui a déchaîné contre lui un ouragan de haine sans précédent. Sa campagne électorale a réuni trois fois moins de financements que celle de son adversaire. Ses soutiens de la droite américaine populaire éprouvent un sentiment d’injustice et malaise qui se cristallise sur des soupçons de fraude électorale. Les haïr, les mépriser, les couvrir de crachats en tant que « petits blancs déclassés » à l’image de toute la nomenklatura politico-médiatique, ne fait qu’amplifier les problèmes. En effet, ce vote représente environ la moitié de l’électorat des Etats-Unis. Une guerre civile n’est jamais dans l’intérêt de personne. M. Trump est certes insupportable avec son narcissisme outrancier et son obsession communicatrice à travers l’avalanche des tweets. Ce naufrage dans la personnalisation du pouvoir et dans le grand guignol permanent, que nous connaissons aussi en France, est un signe de la maladie de la démocratie: gesticuler pour couvrir l’impuissance. Le bilan de son mandat prête à discussion: M. Trump n’a pas déclenché de cataclysme planétaire comme GW Bush et sa calamiteuse intervention en Irak. L’Amérique connaît depuis quelques années une forte croissance et le plein emploi. En outre, les démocrates qui viennent sont rongés par le gauchisme repentant issus de l’idéologie des campus américains. L’histoire montre qu’entre l’angélisme béat et la férocité obtuse, le basculement peut être rapide. Comme souvent, il n’est pas impossible qu’après l’euphorie médiatique générale, viennent le sang et les larmes.

Maxime TANDONNET

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Author: Redaction