Le 20 février, l’Assemblée nationale a définitivement approuvé une loi sur l’immigration. Ma position professionnelle ne m’autorise pas, au moins sur le plan de l’éthique personnelle, en la commenter. Je me contenterai des faits: cette loi est importante. Elle modifie en substance le système des titres de séjour, la procédure de reconduite à la frontière, le dispositif d’accueil des étrangers malades, le droit du sol, etc. Cette réforme, que je ne jugerai pas ici, ni en bien ni en mal, peut avoir un impact pour l’avenir du pays, en cette période marquée par la « crise des migrants ». Or, le jour de son vote solennel à l’Assemblée nationale, un seul député de l’opposition sur plus de 250 était présent et l’hémicycle comptait au total une dizaine de parlementaires sur 570. Depuis, un silence de mort pèse sur cette réforme. Les politiques, les médias n’en disent pas un mot. L’omerta règne. Une chape d’indifférence est tombée. Même les braillards d’extrême droite se taisent, tout à leur vaine reconversion dans la « respectabilité ». Pourquoi? Parce que tous, les uns comme les autres, sont plongés dans leurs petits calculs de posture en vue de la présidentielle de 2017. Le sujet brûle les doigts. En parler ne peut que desservir leurs intérêts personnels ou claniques. Tout ce qui les intéresse aujourd’hui: l’extase de bomber le torse sur le perron de l’Elysée ou sous les dorures de la République. Ce n’est pas à moi de m’exprimer sur ces questions. Je suis serviteur de l’Etat, tenu au devoir de réserve sur les sujets qui relèvent de mon ministère. La confusion des genres à ses limites. 800 parlementaires dont 400 de l’opposition sont rémunérés pour cela, et des centaines de milliers de journalistes et d’élus pourraient s’y intéresser, songer, ne serait-ce qu’un instant, à soulever le couvercle. Je nous sens parfois dans un vaisseau en perdition, balloté par la tempête, gouvernail brisé, faisant eau de toute part, dont le capitaine et l’équipage – la classe politique – ont fui par la dernière chaloupe, abandonnant les passagers, hommes, femmes et enfants, à leur triste sort.
Maxime TANDONNET