Au hasard de mes lectures, je suis tombé sur l’un des individus les plus abjects de l’histoire de France : Fouquier-Tinville. Magistrat de province, sans conviction particulière mais pétri d’orgueil et d’ambition, se retrouve accusateur public de la Convention en 1793. Ce sinistre personnage, exécutant de Robespierre, Saint Just et Marat, envoie à la mort des milliers d’hommes et de femme à l’issue de parodies de procès. Quand il monte à son tour sur l’échafaud, il se montre interloqué : « Je n’ai fait qu’appliquer les ordres ! » La vie politique, quelles que soient les époques, avec plus ou moins de violence larvée ou apparente, est un monde obscur, plus propice aux mauvais coups qu’à l’honnêteté et à la sincérité des convictions. Pour y faire carrière (sauf exception) il faut être « fils ou fille de » ou bien se trouver un mentor, « un bon cheval », et le poignarder dans le dos au bon moment. Elle est rarement compatible avec la force de caractère. « Le bien public requiert qu’on trahisse et qu’on mente et qu’on massacre ; résignons cette commission à gens plus obéissants et plus souples. (Montaigne les Essais III, 1)» Mais il existe un principe historique étrange, mystérieux, échappant à l’explication et à la raison. Les salauds, ceux qui se sont enrichi sur le dos des autres, ont volontairement semé le malheur, ceux qui ont infligé de la souffrance par vice, calcul, vanité, ambition, ceux qui ont trahi, par cupidité ou culte de leur ego, la confiance placée en eux, les délateurs, dictateurs et démagogues, finissent bien souvent par payer leurs crimes d’une manière ou d’une autre. Soit leur époque les attrape, soit la postérité les retrouve, mais le cynisme et la perversité ne restent en général pas impunis. Tout se paye un jour ou l’autre.
Maxime TANDONNET