Sanctuariser l’histoire

imagesEn France, nous avons cette facheuse habitude de considérer l’histoire à l’aune de nos passions et de nos névroses.  Le président de la République a annoncé hier le transfert des cendres de quatre grands résistants au Panthéon, Pierre Brossolette, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion, Jean Zay. Fabrice d’Almeida, professeur d’Histoire à l’Université Panthéon-Assas commente cette décision : « Ce choix est très intéressant. Il y a chez François Hollande la volonté d’unir des familles politiques de sensibilités diverses et de faire consensus au moment où le pays est divisé à bien des égards.  La droite avec la famille gaulliste est représentée par Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Germaine Tillion. L’entrée de Pierre Brossolette et de Jean Zay devrait satisfaire la gauche. Avec cet équilibre, ni la droite, ni la gauche n’ont de raison de se plaindre. » Or, les notions de droite ou de gauche n’ont pas grand chose à voir avec la Résistance qui se traduisait, dans ce qu’elle a eu de plus noble, par le dépassement des clivages de tous ordres, notamment idéologiques et partisans, au nom  de la libération de la Patrie. Ainsi, Pierre Brossolette venait certes du socialisme mais une fois dans la Résistance, il a manifesté un rejet profond, viscéral, de la SFIO, ancêtre du PS,  et des autres partis, les jugeant responsables de la défaite et luttant de toutes ses forces pour les tenir à l’écart du combat contre l’occupation (ce qui l’a opposé à Jean Moulin). L’un de ses  faits d’armes est d’avoir rallié à la France Libre Charles Vallin, venu du parti social français du colonel de la Rocque, classé à droite dans l’avant guerre. Quant à qualifier de « droite » les Gaullistes de l’époque, qui venaient de tous les horizons, cela me semble relever de l’erreur historique. La récupération politicienne de personnages qui ont donné leur vie pour la France me semble profondément déplacée. D’ailleurs, pourquoi ces quatre héros et non d’autres, comme Honoré d’Estienne d’Orves, premier grand résistant fusillé par les Allemands à 41 ans? Est-ce bien le rôle du politique de trier, de sélectionner parmi les héros de l’histoire ? Quand il se montre incapable de traiter les calamités du présent, chômage, insécurité, etc. le politique chasse sur d’autres terres, celles de l’historien. Il me semblerait qu’afin de dépolitiser ce genre de sujet, les grandes décisions relatives à l’histoire devraient incomber à un comité de personnalités qualifiées, et en aucun cas au politique.

Maxime TANDONNET

Author: Redaction