La notion de réarmement civique de la nation était la clé de la conférence présidentielle du 16 janvier consacrée au « grand rendez-vous avec la nation ». Curieusement, elle ne semble avoir intrigué personne. On s’habitue à tout. En sept ans, le discours élyséen a évolué, passant de la start up nation, de l’absence d’une culture française et de la colonisation comme crime contre l’humanité, de l’histoire nationale à déconstruire, au thème du « réarmement civique de la Nation ». En gros, cela signifie que la nation, le peuple français, manque de sens civique, surtout la jeunesse. Dès lors, il faut lui réapprendre le civisme. C’est mépriser les Français que de les accuser de manquer de sens civique, mépriser les 90% Français (ou étrangers en France) qui payent leurs impôts, respectent le code de la route, n’insultent pas et n’agressent pas leurs voisins, ne volent pas dans les supermarchés, essayent d’élever leurs enfants, travaillent et peinent à boucler les fins de mois. En revanche, le réarmement civique devrait surtout s’appliquer aux dirigeants politiques au pouvoir (tous). Qu’ils travaillent humblement au service du pays plutôt que de s’exhiber quotidiennement comme des paons narcissiques pour satisfaire leurs pulsions vaniteuses! Qu’ils en finissent avec le copinage ou les désignations au plus haut niveau de l’Etat de personnalités mises en examen ou évidemment incompétentes par clanisme, népotisme ou calculs politiciens! Qu’ils cessent de creuser la dette publique qui pèsera sur les futures générations et de dire n’importe quoi en tenant des propos contradictoires du jour au lendemain et d’enfumer l’opinion dans la grandiloquence! Bref, qu’ils commencent eux-mêmes à donner l’exemple de l’esprit civique en travaillant au bien commun avant de donner des leçons aux Français. Le SNU et l’uniforme scolaire sont des gadgets ou des attrape-nigauds démagogiques, presque ridicules et dramatiques pour les finances publiques. Par ailleurs, le discours du coup de menton, l’ordre et de l’autorité n’est autre que le reflet inversé du renoncement face à la violence quotidienne: comme s’il fallait faire payer à l’immense majorité des jeunes le chaos qui émane d’une infime minorité de voyous! Les Français attendent une politique concrète, pas des sermons moralisateurs d’un autre âge – un autre âge qu’on n’ose même pas nommer.
[Non, je vous en donne ma parole d’honneur, ceci n’est pas chez moi un esprit de critique systématique, mais bien un violent écœurement que je ressentirais à ce genre de propos quel qu’en soit l’auteur, et pire peut-être s’il émanait de personnalités représentatives de ma sensibilité politique].
MT