Miroir en abyme

Dans une interview télévisée, le chef de l’Etat a déclaré: « Je n’ai pas réussi à réconcilier les Français avec leurs dirigeants ». Il pose là, bien entendu, avec un indéniable courage, une question fondamentale qui dépasse largement sa personne. La fracture démocratique, la coupure entre l’opinion et la classe dirigeante est bien plus ancienne et remonte au milieu des années 1970. Depuis, elle n’a jamais cessé de se creuser, sous les mandats de 5 présidents différents. Le fond du problème est explosif. Les dirigeants du pays ne cessent de prendre les Français pour moins intelligents qu’ils ne le sont. Donc, ils voient en eux, avant tout, des marionnettes à qui l’on peut tout faire croire, et que l’on peut manipuler, finalement sans aucune limite. Ils ont renoncé, sur une quarantaine d’années, au fondement même de la politique qui est, ou devrait être, le service de la nation. Ils en ont fait un tremplin au service de leur vanité et de leur narcissisme. Ainsi, la politique est devenue pour l’essentiel, une affaire de communication, de paraître et de faire semblant, et non plus d’action. Ce choix de la classe dirigeante, qui concerne tous les courants politiques de l’extrême gauche à l’extrême droite, comporte une faille essentielle, au cœur de cette  faillite: l’intuition populaire qui est réelle et que perçoivent mal les responsables politiques coupés du ressenti populaire par une barrière de vanité. Les gens savent et ressentent fortement quand on se moque d’eux. Et comble du paradoxe, cet aveu du chef de l’Etat, comme dans un jeu de miroir en abyme, s’inscrit dans le grand spectacle narcissique quotidien que « les gens » qu’ils ne supportent plus. La tragédie de la politique française atteint aujourd’hui son paroxysme dès lors qu’un président ne contribue pas seulement à cette fracture démocratique, mais il l’incarne à travers sa personne. Cela, nous l’avions annoncé sur ces pages depuis bien longtemps. Les mots ou les gestes emblématiques ne servent absolument à rien pour réconcilier la politique avec les Français, bien au contraire, ils contribuent à l’aggravation du mal comme les mouvement désordonnés du malheureux piégé par les sables mouvants et qui l’entraînent toujours plus au fond. Le président peut-il sauver son quinquennat? Fausse question, car cela n’a strictement aucune importance: c’est un pays en danger qu’il faut sauver, pas le quinquennat. La France a besoin d’une révolution copernicienne de la politique: que ses dirigeants politiques se mettent authentiquement, collectivement et modestement à son service, en faisant du mieux qu’ils peuvent dans un contexte d’une infinie complexité, sans penser à leurs intérêts matériels, de vanité ou de réélection, et qu’ils cessent de fanfaronner. Mais qui peut y croire?

Maxime TANDONNET

Author: Redaction

Miroir en abyme

Dans une interview télévisée, le chef de l’Etat a déclaré: « Je n’ai pas réussi à réconcilier les Français avec leurs dirigeants ». Il pose là, bien entendu, avec un indéniable courage, une question fondamentale qui dépasse largement sa personne. La fracture démocratique, la coupure entre l’opinion et la classe dirigeante est bien plus ancienne et remonte au milieu des années 1970. Depuis, elle n’a jamais cessé de se creuser, sous les mandats de 5 présidents différents. Le fond du problème est explosif. Les dirigeants du pays ne cessent de prendre les Français pour moins intelligents qu’ils ne le sont. Donc, ils voient en eux, avant tout, des marionnettes à qui l’on peut tout faire croire, et que l’on peut manipuler, finalement sans aucune limite. Ils ont renoncé, sur une quarantaine d’années, au fondement même de la politique qui est, ou devrait être, le service de la nation. Ils en ont fait un tremplin au service de leur vanité et de leur narcissisme. Ainsi, la politique est devenue pour l’essentiel, une affaire de communication, de paraître et de faire semblant, et non plus d’action. Ce choix de la classe dirigeante, qui concerne tous les courants politiques de l’extrême gauche à l’extrême droite, comporte une faille essentielle, au cœur de cette  faillite: l’intuition populaire qui est réelle et que perçoivent mal les responsables politiques coupés du ressenti populaire par une barrière de vanité. Les gens savent et ressentent fortement quand on se moque d’eux. Et comble du paradoxe, cet aveu du chef de l’Etat, comme dans un jeu de miroir en abyme, s’inscrit dans le grand spectacle narcissique quotidien que « les gens » qu’ils ne supportent plus. La tragédie de la politique française atteint aujourd’hui son paroxysme dès lors qu’un président ne contribue pas seulement à cette fracture démocratique, mais il l’incarne à travers sa personne. Cela, nous l’avions annoncé sur ces pages depuis bien longtemps. Les mots ou les gestes emblématiques ne servent absolument à rien pour réconcilier la politique avec les Français, bien au contraire, ils contribuent à l’aggravation du mal comme les mouvement désordonnés du malheureux piégé par les sables mouvants et qui l’entraînent toujours plus au fond. Le président peut-il sauver son quinquennat? Fausse question, car cela n’a strictement aucune importance: c’est un pays en danger qu’il faut sauver, pas le quinquennat. La France a besoin d’une révolution copernicienne de la politique: que ses dirigeants politiques se mettent authentiquement, collectivement et modestement à son service, en faisant du mieux qu’ils peuvent dans un contexte d’une infinie complexité, sans penser à leurs intérêts matériels, de vanité ou de réélection, et qu’ils cessent de fanfaronner. Mais qui peut y croire?

Maxime TANDONNET

Author: Redaction