Loi de finances 2012: La retraite chapeau est de plus en plus taxée et de moins en moins déductible….



Il y a un an, le projet de loi de finances pour 2011 comportait une limitation du montant des retraites chapeaux versées par les entreprises à leurs salariées à 30% du montant annuel de leur dernière rémunération. On sait que lorsqu’un salarié ou un dirigeant part à la retraite, son employeur peut s’engager à lui assurer un complément de retraite bien souvent jusqu’à son décès. C’est ce qu’on appelle une retraite chapeau. Par réaction avec quelques retraites chapeaux de dirigeants d’entreprises jugées excessives, le législateur durcit considérablement la fiscalité attachée à ces formes de rémunérations différées. Mais l’évolution de la législation en matière de retraite invite à se tourner vers d’autres sources de financement  que les régimes par répartition d’où la volonté de préserver la solution retraite-chapeau. Aux Etats-Unis par exemple, il existe de nombreuses entreprises qui confèrent à leur salariés une retraite (on en a vu les travers lors de la faillite de General Motors). Autre exemple: en Espagne, la mise en place d’un système de retraite d’entreprise a joué pour beaucoup dans la réussite de la réorganisation de l’opérateur historique Téléphonica à la suite de l’entrée des nouveaux arrivants dans le cadre de la libéralisation des activités de télécommunication. Les personnes intéressées par les télécoms en Europe ont coutume de dire que cette retraite chapeau des salariés espagnols explique pour beaucoup la différence de climat social entre l’opérateur historique espagnol et l’opérateur historique français (voir sur ce sujet, le reportage de Catherine Benazeth : Télécoms, le grand chambardement ici).


Puisque le débat sur la retraite n’est pas réglé et  comme il s’agit là d’une solution à exploiter pour tous les salariés (avec ses défauts et ses qualités), il n’était pas question de condamner, par une jalousie de caste envers quelques-uns, la retraite chapeau en France dans le cadre d’une loi de finances.


Aussi, la disposition qui prévoyait la limitation des retraites chapeaux a été supprimée: il  n’appartient pas au législateur fiscal d’intervenir dans la politique salariale de l’entreprise (voir blog le monde comptes publics).


Toutefois, si le principe de la validité de la retraite chapeau reste en place, l’institution de prélèvements de plus en plus importants viennent tempérer l’intérêt de cette forme de rémunération. 


Pour le législateur, il s’agit de compenser le fait que cette forme de rémunération différée n’est pas soumise à cotisations sociales, ni à CSG. Mais, à quoi bon conserver une rémunération différée si elle est autant taxée qu’une rémunération immédiate?


Depuis la loi de finances 2012, le régime est le suivant:


Pour le bénéficiaires, les retraites chapeaux sont taxées en tant que rente. Elles sont soumises en plus à un prélèvement salarial  depuis 2012 de (article L 137-11-1 du Code de la sécurité sociale)  :


Pour les retraites liquidées avant le 1/01/11 :
  – 7  % pour la part de ces rentes supérieure à 500 € et inférieure ou égale à 1 000 € par mois ;
  – 14  % pour la part de ces rentes supérieure à 1 000 € et inférieure ou égale à 24 000 € par mois ;
  – 21  % pour la part de ces rentes supérieure à 24 000 € par mois.


Pour les retraites liquidées à partir du 1/01/11 :

      – 7  % pour la part de ces rentes supérieure à 400 € et inférieure ou égale à 600 € par mois ;

      – 14  % pour la part de ces rentes supérieure à 600 € et inférieure ou égale à 24 000 € par mois ; 

      – 21  % pour la part de ces rentes supérieure à 24 000 € par mois 


Question: ce prélèvement supplémentaire opéré par la compagnie d’assurance (ou l’entreprise) qui verse la rente est-il déductible? 


Réponse (rétroactivement à compter de 2011): seule la partie du prélèvement acquittée au titre des premiers 1 000 € de rente mensuelle est déductible. Cela correspond à environ 35 € par mois….(aticle 83 2°0 quater du CGI).  Les bénéficiaires apprécieront le geste….


Stanislas Lhéritier
Avocat
Spécialiste en droit fiscal



Author: Redaction