« Sous l’ancien régime, le détournement des fonds publics était puni de la pendaison », a déclaré l’un des procureurs du procès Fillon. La justice de l’ancien régime était arbitraire, rendue par les seigneurs en fonction de l’ordre dont relevaient les justiciables, pratiquait la torture et la peine de mort pour un simple vol. A-t-on jamais vu, depuis 1789, un juge républicain s’y référer comme modèle? Et depuis l’abolition de 1981, un magistrat en appeler à la peine de mort? Embaucher sa femme et la faire travailler près de soi, de la part d’un parlementaire, sur des fond publics, est certes une pratique douteuse: qui dit argent public dit mise en concurrence d’un emploi ouvert à tout un chacun en fonction de ses compétences. Cependant, cette pratique était légale et totalement banalisée: 140 parlementaires utilisaient ouvertement des proches dans leur équipe. L’accusation envers le couple Fillon porte sur la réalité du travail de l’épouse. Qu’en est-il de la preuve du travail des proches des autres parlementaires qui se sont adonnés à la même pratique – sans compter tous les autres qui l’ont fait sournoisement? Et les ministres avec leur cabinet? Il fallait que le procès Fillon ait lieu. Il est l’arbre qui cache la forêt. Il a un caractère fondateur. Le scandale Fillon est directement à l’origine de l’explosion en plein vol de l’élection présidentielle de 2017 et du triomphe d’un « nouveau monde ». Il conditionne la légitimité de ce « nouveau monde ». Des hommes et femmes qui ont pris une part active au quinquennat 2007-2012, la plupart sont englués dans d’épouvantables affaires judiciaires. Ils n’ont sûrement pas fait pire que les autres mais ils incarnent ce que l’idéologie dominante et invasive, le supposé « progressisme » entend tuer par tous les moyens: une vision de la France, de l’Etat, de la société, de la démocratie. Mais pourquoi donc choisir l’action publique, le service de la France à travers la politique, pour finir comme le couple Fillon, traîné devant les médias, traités comme des criminels, promis à la pendaison, dans l’humiliation et face à la jubilation intérieure, jouissive, de la foule des salauds – au sens sartrien? Consacrer sa vie au bien public, à l’intérêt général, à la vie démocratique – au suffrage universel – au gouvernement de la France, pour en arriver là… Tout ceci est bien répugnant.
Maxime TANDONNET