L’histoire ne se répète jamais à l’identique. C’est pourquoi je me méfie comme de la peste des comparaisons historiques et notamment de la sempiternelle référence aux "accords de Munich" qui revient à chaque tension internationale. La transformation des technologies, les modes de vie et de pensée, des idéologies, des institutions, de la société, rendent impossible la résurgence tels quels d’événements du passé. Cependant, les hommes, leur caractère, les déterminants de leur comportement – ambition, lâcheté, cupidité – demeurent de millénaire en millénaire et se retrouvent sous des habits différents dans le déroulement de l’histoire qui bégaye, faute de se répéter. On peut se demander si nous ne sommes pas aujourd’hui à un tournant. Le mode occidental, les Etats-Unis et l’Europe, après une trentaine d’années de domination et de progrès de la démocratie avec le déclin et la chute de l’URSS, vient de connaître deux revers spectaculaires et gravement préoccupants: le maintien au pouvoir du régime syrien et surtout l’annexion de la Crimée par la Russie. Nous ne sommes plus dans les années 1930 et les comparaisons à cet égard me semblent hasardeuses. Pourtant, nous assistons à d’autres phénomènes qui ne sont pas forcément plus réjouissants. L’affaiblissement des économies américaine et européennes à la suite de la crise de 2008, le déclin de l’autorité et du pouvoir politique, le délitement des sociétés, la montée des doutes, se traduisent peut-être en ce moment par un recul du monde occidental et de ses valeurs, au profit de nouvelles grandes puissances qui s’en démarquent, notamment de la Russie. C’en est fini de la "fin de l’histoire" et nous entrons probablement dans une période de retour de la tension planétaire en position de faiblesse évidente et dramatique.
Maxime TANDONNET