« Dans le dernier baromètre Elabe pour « Les Echos », il est la quatrième personnalité politique préférée des Français, avec 29 % d’image positive, de loin premier à gauche, et le seul parmi le Top 6 à progresser (+2 en avril). » De qui parle-t-on ainsi? De François Hollande qui « retrouve ainsi les faveurs de l’opinion » (sic). Un historien spécialiste du Directoire et du Consulat me l’avait annoncé un jour, lors d’une réception en 2018: « Vous verrez, quand la France aura atteint le fond de l’abîme, elle regrettera François Hollande« . Alors, oubliées les virées nocturnes en scooter? Oubliée Léonarda? Oubliées les promesses fantaisistes, répétées pendant cinq ans sur la baisse du chômage? Oublié le cirque de six mois sur la déchéance de nationalité comme réponse au massacre du Bataclan, avant un enterrement de première classe? Oubliée l’annonce de la fin de la menace terroriste, un 14 juillet 2016, quelques heures avant la tuerie de Nice? Oublié le chaos social permanent? Et le scandale? Oublié « Un président ne devrait pas dire ça? » De fait, l’opinion semble avoir la mémoire courte. Pourquoi un tel retour, ou plutôt demi-retour en grâce? (4ème avec 29%, comme on dit, au pays des aveugles, les borgnes sont rois). Parce que François Hollande, avec sa silhouette, son air bonhomme et simple, incarne bien « l’anti-macron ». A juste titre: un président « normal » est mieux qu’un président (prétendument) « Jupiter ». Les Français (enfin, les 29%) ont raison, au fond, de préférer la bonhommie apparente – apparente – à l’arrogance bavarde : pour un résultat à peu près identique. Mais ils oublient aussi autre chose: l’actuel chef de l’Etat, qu’ils peinent à supporter malgré sa double élection, est une pure créature de François Hollande, son fils politique, spirituel, son enfant prodigue, son héritier idéologique. Ils oublient que la politique des mandats Macron (économique, budgétaire, sécuritaire, sociétale, migratoire, sanitaire, énergétique, diplomatique, etc.) est grosso modo la même que celle de l’ère Hollande – sauf sur la fiscalité des milliardaires. Et cela est bien normal dès lors que M. Macron est une pure créature de M. Hollande. Avec une différence quand même: M. Hollande est (me semble-t-il) d’un niveau d’intelligence – au sens de l’intuition, la lucidité sur soi-même, sur les autres, sur le monde et sur l’histoire – sensiblement au-dessus de l’actuel président. Le secret d’une carrière politique réussie aujourd’hui – jusqu’à l’Elysée – n’est surtout pas l’intelligence comme définie ci-dessus. C’est la désinhibition, l’absence de sur-moi (au sens freudien) ou de limite, de conscience de soi et des autres, être prêt à absolument tous les mauvais coups, tous les mensonges, les manipulations, la démagogie, sans limites, toutes les volte-face, un cynisme, parfois confondu à tort avec l’intelligence, tous les pires sales coups pour le bien public. Tel est l’un des grands malheurs de la France. Et jamais le bout du tunnel n’a paru aussi éloigné, sinon illusoire…
MT