– Dans un sondage OpinionWay – KéaPartners publié le mercredi 16 mars, Valérie Pécresse est placée en 5ème position des intentions de vote, derrière Eric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon. Est-ce le signe d’un mal plus profond chez LR ? Si ce score se vérifiait en avril prochain, le parti risquerait-il de subir un destin comparable à celui du PS, après l’élection d’Emmanuel Macron et l’échec de Benoît Hamon ?
Un troisième échec consécutif aux élections présidentielles risquerait de l’affaiblir durablement. Un destin comparable à celui du PS constitue un scénario plausible : une partie rejoignant le camp macroniste, et une autre, étant tentée par les extrêmes. Il resterait un parti croupion à quelque 2% des voix. Ce scénario ne me semble pourtant pas être le plus probable. Une vaste frange de l’opinion n’est séduite ni par le macronisme ni par les droites dites nationales. Au-delà de l’hypothèse d’un piteux résultat à l’élection présidentielle, cette frange de l’opinion que l’on peut qualifier de démocrate et de libérale, sera toujours en quête d’une troisième voie qui se traduira dans les urnes en d’autres occasions. Les législatives seront importantes à cet égard : se traduiront-elles par un raz-de-marée macroniste ou une volonté de rééquilibrage, autour de préoccupations intérieures, après le sacre du « chef de guerre » ?
– Faut-il chercher dans cette débâcle annoncée un manque de ligne idéologique claire, avec une droite plus centrée sur les libertés et une autre plus axée sur les souverainetés ? Valérie Pécresse peut-elle être tenue pour responsable de cette situation ?
Valérie Pécresse a été gravement desservie par le contexte : des trahisons spectaculaires au pire moment pour elle, un climat de mépris et de moquerie à son égard répandu dans la presse et les médias, enfin la guerre d’Ukraine qui a achevé de la déstabiliser en valorisant le président-candidat. Elle-même a déçu lors de son discours du zénith beaucoup trop long et confus s’empêtrant dans des déclarations contradictoires, mais aussi lors de son débat avec Eric Zemmour en donnant dans une virulence qui est à contre-emploi de sa personnalité. Elle n’a pas jusqu’à présent réussi à trouver le bon ton. Avec l’élection présidentielle, on est dans une bataille d’émotions autour d’images personnelles bien plus que dans le combat d’idées. Pour l’instant elle n’est pas parvenue à imposer une image…
– En 2017, malgré les affaires de François Fillon, la droite avait sauvé les meubles et gardé de l’influence pendant le quinquennat, dans l’opposition. Mais dans quelle mesure Les Républicains payent ce qu’ils ont fait (ou pas fait) pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron ? Quelles ont été les plus grosses erreurs du parti lors de ces cinq dernières années ?
C’est toujours facile après-coup… mais il me semble que le parti a eu tort de se focaliser trop longtemps sur la candidature à la présidentielle, des débats qui ont duré des mois ou des années sur la question des primaires ou de la modalité de désignation de leur candidat. Ils en ont complétement délaissé le débat d’idées sur la préparation de l’avenir, la réflexion sur le devenir de la démocratie française et des libertés. Ils se sont trop facilement soumis au jeu des slogans par exemple pour ou contre la thèse du « grand remplacement » qui ont écrasé les débats sur les questions de fond. Ils n’ont cessé de courir après les uns et les autres, soit les macronistes soit les partisans de Mme le Pen ou de M. Zemmour. Ils ont renoncé à être eux-mêmes, leur identité profonde qui est à la fois l’ordre et la défense de la liberté. Enfin, leur complaisance envers les gesticulations aussi inefficaces que liberticides et démagogiques du pouvoir macronien face au covid 19 fut probablement l’erreur – ou la faute – la plus lourde. Ils avaient une occasion de s’en démarquer et d’afficher leur personnalité. Ils ne l’ont pas saisie.
– La dévitalisation du parti Les Républicains est-elle inévitable après l’élection présidentielle de 2022 ? Quelles sont les alternatives ? Une atomisation plus grande encore du paysage politique ?
Attendons le résultat ! Mais dans l’hypothèse d’une réélection de M. Macron, à la faveur de circonstances exceptionnelles (covid 19 et Ukraine) – les années qui viennent ne peuvent qu’être extrêmement difficiles pour l’équipe au pouvoir. Le contexte a fait oublier que M. Macron est impopulaire. Il commencerait son second quinquennat en étant déjà rongé par l’usure du pouvoir. Lui et son équipe devront faire face à l’amoncellement des difficultés économiques, financières, sociales et sécuritaires dans un climat extraordinairement explosif. Les Français pourraient alors être tentés se tourner à nouveau vers une opposition de droite. Cela dit, dans un contexte politique en pleine décomposition, celle-ci devra se réinventer. De nouvelles équipes doivent s’affirmer à travers des hommes et femmes qui n’ont jamais trahi ni par le vote ni par les idées, à l’image de personnalités comme Julien Aubert, David Lisnard, Olivier Marleix ou Valérie Boyer, etc. Les hommes et femmes qui émergeront du chaos devront porter la révolution nécessaire autour de la volonté de réconcilier la politique avec les idées et le bien commun plutôt que les délires narcissiques.
MT