L'AIE a publié le 12 novembre 2014 une nouvelle édition du rapport World Energy Outlook (WEO). Ce rapport annuel présente différents scénarios de politiques énergétiques jusqu'en 2040, permettant d'analyser les grandes évolutions énergétiques en cours ou à venir, et les enjeux et limites du point de vue de la lutte contre le changement climatique.
Outre les tendances énergétiques globales, il inclut deux parties approfondissant les perspectives du nucléaire au niveau mondial et de l'énergie en Afrique sub-saharienne, qui s'ajoutent à un « rapport spécial » paru le 3 juin sur les investissements dans le secteur de l'énergie.
Le WEO 2014 maintient la structure en scénarios des éditions précédentes, mais à un horizon prolongé jusqu'à 2040 :
- un scénario central, dit « Nouvelles Politiques » (NP), qui tient compte des engagements en matière de réduction des gaz à effet de serre, notamment suite aux accords de Cancun (2010),
- un scénario tendanciel, dit « Politiques Actuelles » (PA), qui décrit l'évolution des marchés mondiaux de l'énergie en prenant en compte uniquement les politiques en vigueur mi-2014,
- un scénario « 450 » proposant une évolution du système énergétique mondial qui permettrait de faire diminuer les émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement climatique à 2°C (par rapport à l'ère pré-industrielle).
En assumant certaines hypothèses technologiques et macro-économiques, telles que celles sur les prix du pétrole (132 $/bl en 2040 pour NP, 155 pour PA et 100 pour 450), le WEO 2014 apporte quantité d'analyses sur le système énergétique mondial, dont il est proposé ci-après un léger aperçu :
- malgré un net ralentissement (+1% par an après 2025, contre plus de 2% par an au cours des 20 dernières années), la demande énergétique mondiale devrait croître de 37% d'ici 2040 dans le scénario central, essentiellement hors OCDE et Chine ;
- d'après le GIEC, le « budget » d'émissions de CO2 que la Planète peut tolérer sans trop de dégâts s'élève à 2 300 gigatonnes (Gt) et il n'en reste plus que 1 000 Gt que, selon l'AIE, la prolongation des tendances actuelles conduirait à épuiser d'ici 2040 ;
- il n'est pas envisagé par l'AIE de tensions durables sur les ressources d'ici 2040 mais, même dans le scénario central, l'évolution des politiques et la pression des marchés tendent à faire réduire la part des énergies fossiles à 75% du mix énergétique mondial, contre 82% actuellement ;
- la cohérence du scénario central repose sur un volume d'investissements considérable, évalués à 48 000 milliards de dollars en cumulé d'ici 2035, dont 40 000 milliards pour l'approvisionnement (production, transport, distribution) et 8 000 milliards pour l'efficacité énergétique ;
- pour pouvoir limiter le réchauffement climatique à 2°C, l'AIE estime que 1 600 milliards de dollars par an devraient être investis dans les technologies bas carbone, contre 900 milliards dans le scénario central ;
- les subventions aux énergies fossiles ont représenté 550 milliards de dollars pour la seule année 2013, soit plus de quatre fois le montant des subventions allouées aux énergies renouvelables ; il s'ensuit, par exemple au Moyen-Orient, que près de 2 Mbl/j de fioul sont utilisés pour produire de l'électricité alors que sans subvention cette électricité aurait pu être produite de façon compétitive par des énergies renouvelables ;
- l'électricité est la forme d'énergie dont la demande finale est la plus dynamique, avec un besoin de capacité supplémentaire évalué à 7 200 GW d'ici 2040, alors que dans le même temps 40% du parc de centrales électriques (toutes technologies confondues) doit être remplacé ;
- à l'horizon 2040, les énergies renouvelables (hydroélectricité, éolien solaire,…) assureront un tiers de la production mondiale d'électricité (37% dans les pays OCDE) et contribueront pour moitié à la hausse de cette production ;
- la capacité mondiale d'électricité nucléaire devrait croître de 60% d'ici 2040 dans le scénario central, dépassant 620 GW (dont +130 GW en Chine, +32 GW en Inde, +19 GW en Russie, mais –10 GW au Japon et –18 GW en Europe) ;
- sur les 434 réacteurs qui étaient opérationnels dans le monde à la fin 2013, 200 devraient être mis à l'arrêt d'ici 2040, principalement en Europe, aux Etats-Unis et au Japon ; l'AIE estime, en première approximation, à 100 milliards de dollars le coût de démantèlement de ces réacteurs ;
- 620 millions de personnes sont privées d'électricité en Afrique sub-saharienne et près de 730 millions recourent encore à la biomasse solide pour la cuisson dont les effets de pollution atmosphérique entraîne 600 000 décès prématurés par an ;
- dans le scénario central, près d'un milliard d'habitants d'Afrique sub-saharienne accèderont à l'électricité d'ici 2040, mais 500 millions en resteront privés ;
- l'Afrique sub-saharienne est riche en ressources énergétiques de tout type et l'AIE préconise trois séries de mesures pour que leur exploitation bénéficie à la population : investir dans la distribution d'électricité, développer la coopération régionale, mieux gérer le financement des infrastructures ;
- d'ici 2040, le coût payé par les consommateurs d'énergie croîtra partout dans le monde mais les Etats-Unis et l'Inde seront avantagé par rapport à toutes les autres régions, surtout par rapport à l'Europe.
Compte tenu de l'implication des questions sur l'énergie dans la préparation de la Conférence de Paris sur le climat en décembre 2015,l'AIE publiera au printemps, comme deux ans plus tôt, un rapport spécial du WEO dédié à la lutte contre le changement climatique.
Pour plus d'informations, consulter les documents relatifs au rapport sur le site Internet de l'AIE www.worldenergyoutlook.org
☛ Lire la suite sur le site du Ministère du Développement Durable, peut-être non effacé ...