Je ne sais pas si vous avez remarqué, comme moi, mais chaque jour, en ce moment, les médias sortent de nouveaux sondages. Ils ne portent pas directement sur les futures élections: pas question d’insister sur la faiblesse du président-candidat. Mais ils instillent un message constant autour de l’image des personnalités. Le matraquage insiste sur la chute de Sarkozy, et encore et encore, sur la popularité d’Alain Juppé et sur l’ascension de M. Macron. Penser qu’ils sont truqués n’a pas grand sens. Il est trop facile d’applaudir les sondages quand ils vont dans votre sens et de les rejeter quand ils vous déplaisent. Cependant, une puissante logique de manipulation de l’opinion est à l’œuvre. Les sondages ne cessent de transformer des tendances, même éphémères, en normes de penser. Ainsi, à force de se répéter, ils métamorphosent une vague sympathie envers M. Macron en nouveau culte de la personnalité. Le voici en candidat virtuel à l’Elysée! Quand on regarde les sondages, ils tendent vers le politicien idéal, neutre, aseptisé: style gendre idéal, vaguement libéral dans ses idées économiques, plutôt libertaire – ou indifférent – sur les questions de société, le physique irréprochable, capable d’une petite phrase provoquante, mais sans plus, sans aspérité, dépourvu de velléité autoritaire, communicant, propre sur lui, transparent. Dans sa quête de la perfection, le monde médiatique tend vers une image de la gouvernance parfaite: neutre, sans autorité, invisible. Pour lui, un personnage comme Sarkozy qui évoque une forme de volontarisme, de rudesse, et d’autorité est devenu diabolique. Au fond, les sondages tendent vers un idéal qui est celui de la négation du politique, du gouvernement, de l’autorité, de l’Etat. Bien sûr que derrière ce phénomène, c’est le système politique français qui est devenu fou, pas seulement les institutions, mais la culture, la vision de la politique. La politique est devenu un spectacle, un Grand-Guignol vaguement grotesque, dominé par le narcissisme pathologique de personnages qui ne songent qu’à faire parler d’eux à n’importe quel prix, même des pires reniements, une scène débile alors que le monde s’embrase et que la France a besoin d’être dirigée, protégée, gouvernée…
Maxime TANDONNET