Le plus tragique, dans le camp des républicains modérés, ce n’est pas le retour de la vieille garde, les Alain Juppé, François Fillon, Jean-Pierre Raffarin. On pourrait y voir une solution transitoire, un passage de relais. Non, le plus préoccupant, c’est bien l’absence de relève visible en perspective. J’en ai fréquenté beaucoup, de près ou de loin, et ils me donnent le sentiment, sans méchanceté, d’être formatés sur le même modèle, celui de bons gestionnaires sans doute, mais fausses intelligences, le crâne vide d’idées, de vision, de perspective, têtes bien pleines plutôt que bien faites: le Maire, Valérie Pécresse, Bertrand, NKM, Chatel, etc. Ils voudraient diriger la France comme on gère une collectivité locale. Face à la faillite d’un pouvoir socialiste qui s’éloigne tous les jours de la France, écartelé entre l’idéologie la plus obtuse sur les questions de société et le conformisme absolu en matière économique, cette nouvelle génération devrait avoir un boulevard devant elle. Or, elle est tout en fadeur, tranparente, inexistante. Elle voit la politique par le petit bout de la lorgnette, se résumant à la course à l’Elysée. Cette médiocrité à la fois intellectuelle et humaine, absence de caractère, obsession de la "propreté idéologique" vu comme l’arme secrète de la marche vers le Palais a des conséquences dramatiques, notamment celle de priver d’espoir politique la jeunesse ou de pousser une partie d’entre elle vers des pitreries démagogiques. Il existe dans la vie publique française, quelques responsables au sens fort du terme, lucides, à la fois mesurés et fermes dans leurs convictions et prêts à s’engager pour le pays. Mais le monde médiatique les ignore obstinément: même minoritaires, ceux là sont beaucoup trop dangereux à ses yeux. Il faudra que la crise de société qui couve depuis si longtemps explose enfin pour que peut-être, poussés par les circonstances, ils sortent de leur silence et anonymat.
Maxime TANDONNET