J’ai fait récemment une belle découverte dans un carton familial oublié depuis des lustres, un vieux livre jauni des années 1930, rongé par l’humidité et les souris, les « lettres de Gambetta (1868-1882) », publiées par Grasset. En le feuilletant, je tombe sur ces paroles du héros de la « guerre à outrance » en 1870, éphémère président du Conseil de Jules Grévy en 1881, adressées à son amie Léonie Léon, qui expriment si bien notre accablement et notre désarroi face à l’impasse politique actuelle, une plongée dans l’abîme et la médiocrité qui s’amplifie de semaine en semaine: « Il ne s’agit plus, en effet, en présence de cette explosion de haine et de sottise, de politique, de textes et de droit public ou électoral, mais d’un intérêt suprême : y aura-t-il, oui ou non, un gouvernement digne de ce nom ? » (19 janvier 1882). « Il ne me restera plus qu’à abandonner à eux-mêmes ces aimables énergumènes, et à aller attendre l’heure, hélas ! trop prochaine, où il faudra réparer leurs fautes, peut-être leurs crimes contre la République et la France » (21 janvier 1882). Hier soir, j’ai eu les prémices de la vengeance, bien que ce met délicat doit se manger froid » (27 janvier 1882). Gambetta, l’un de nos grands hommes d’Etat, a terminé sa carrière sans être jamais rappelé au pouvoir, sous les insultes, surnommé le "dictateur", dans la solitude, le désespoir et la maladie.
Maxime TANDONNET