En 1983, la France a exclu du don du sang les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH). Cette décision, partagée par de très nombreux pays, avait été motivée par un risque d’exposition au VIH plus important lors d’une relation sexuelle entre hommes que lors d’une relation hétérosexuelle ou d’une relation sexuelle entre femmes.
Cette exclusion est aujourd’hui vécue comme une discrimination, une présomption de séroposivité. Aujourd’hui, rien ne la justifie scientifiquement. C’est la raison pour laquelle j’avais annoncé dès 2012 ma volonté d’y mettre fin. Depuis 15 ans, les ministres de la santé successifs s’étaient engagés à avancer. Aucun ne l’a fait.
Un travail important a été mené : experts, opérateurs et associations représentatives de patients, de donneurs, associations LGBT : chacun a pu contribuer, faire valoir son point de vue, rapprocher ses positions.
A l’issue de ce travail, j’ai pu annoncer aujourd’hui la fin de l’exclusion définitive du don du sang pour les homosexuels. Pour que cette décision soit incontestable, il faut qu’elle soit étayée scientifiquement. Toutes les conditions de sécurité doivent être remplies, la sécurité est indispensable pour maintenir la confiance de nos concitoyens dans notre système de santé.
Beaucoup de pays (Allemagne, Autriche, Danemark…) ont choisi de maintenir l’exclusion définitive des homosexuels. Ce n’est pas notre choix. D’autres pays (Australie, Etats-Unis, Pays-Bas, Japon…) ont choisi de se limiter à un ajournement (absence de relation sexuelle avec un autre homme) de 12 mois. Ce n’est pas notre choix non plus.
Notre objectif, c’est bien d’aller vers un alignement des conditions requises pour donner son sang, afin qu’elles soient les mêmes pour tous. Pour cela, nous allons procéder par étapes.
Première étape, au printemps 2016. Les homosexuels pourront donner leur plasma dans les mêmes conditions que les hétérosexuels, c’est-à-dire dès lors qu’ils ont un partenaire stable depuis au moins 4 mois. S’agissant du don du sang total, nous mettons fin à l’exclusion définitive en permettant le don après une période d’ajournement de 12 mois.
La deuxième étape interviendra environ 1 an plus tard. Les études qui vont pouvoir être menées sur les dons de plasma et de sang total nous permettront de poursuivre. Mon objectif ? Ramener la période d’ajournement de 12 à 4 mois.
Un travail va s’engager maintenant pour modifier le questionnaire proposé à ceux qui veulent donner leur sang. Il intégrera ces éléments nouveaux pour les homosexuels, il précisera aussi les conditions du don pour les hétérosexuels ayant eu des pratiques à risque.
Nous tournons définitivement une page : la fin de l’exclusion définitive du don du sang en raison de l’orientation sexuelle. Avec une exigence : que toutes les conditions de sécurité soient garanties. Avec une seule détermination : la reconnaissance de ce beau geste de solidarité et de générosité qu’est le don du sang.
Marisol TOURAINE