Seul le prononcé fait foi.
Madame la ministre, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Monsieur l’ambassadeur, Amiral, officiers, officiers mariniers, sous-officiers, militaires du rang des forces françaises aux Emirats arabes unis, Mesdames et Messieurs, chers amis.
Je suis avec Madame la ministre des Armées, avec les membres et les élus de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui m’accompagnent, extrêmement heureux d’être ici sur ce BPC Tonnerre, avec vous.
Très heureux, pour toute une série de raisons, dont certaines sont essentielles, dont d’autres sont plus accessoires. Je commence par les accessoires. Quand nous sommes partis hier, avec Madame la ministre, il neigeait, et quand nous reviendrons demain, il pleuvra. Evidemment les parenthèses peuvent avoir du bon, et de ce point de vue là je suis évidemment heureux d’être présent parmi vous.
Plus sérieusement, je suis heureux d’être sur ce bâtiment dont les différents avatars font honneur à la Marine nationale, et qui ont su, dans des circonstances extrêmement variées, montrer la place infiniment particulière qu’occupent les forces armées en général, la Marine en particulier, dans de la vie de notre Nation.
Il y a quelques minutes j’étais avec le commandant de ce navire, qui faisait état de l’opération qui avait été conduite en excellente coopération avec nos amis Américains, mais ce même bâtiment, il y a quelques mois, était sur d’autres parties du globe, dans d’autres mers, sous d’autres climats, et accompagnait les populations françaises, et notamment les populations de l’île de Saint-Martin, qui avaient été durement frappées par les événements climatiques, dont vous vous souvenez peut-être.
Dans des moments où nos concitoyens jouent des choses qui peuvent être essentielles, soit leur survie, soit la sécurité de leur Nation, il y a, sur toutes les mers du globe, des Françaises et des Français, qui sont présents, qui sont compétents, qui sont formés, qui sont déterminés à servir leur pays, et ceux-là, Mesdames et Messieurs, ils font l’honneur de la France. Et comme il y en a beaucoup ce soir, je tenais à leur porter, en votre nom à tous, ce coup de chapeau.
La dernière raison pour laquelle je suis heureux d’être avec vous, c’est parce que c’est toujours un vrai plaisir, à l’occasion des rares déplacements à l’étranger que le Premier ministre est en mesure de faire, de rencontrer la communauté française, parce que la communauté française elle aime la France, même si elle n’y vit plus. Parfois c’est pour un moment de temps très limité, parfois ça dure, mais il y a toujours ce lien, et d’ailleurs s’il n’y avait pas ce lien vous ne seriez pas là ce soir. On aime son pays, et l’expérience qui est la mienne, de quelqu’un qui a vécu pendant quelques années en dehors de son pays, c’est lorsque l’on vit ailleurs que dans son pays que le lien avec son pays se transforme, souvent pour se renforcer, parfois pour se distendre, c’est vrai, mais toujours pour interpréter autrement, ce qui fait la caractéristique d’être Français et de vivre en France. On regarde toujours son pays différemment lorsqu’on vit à l’étranger. Les anciens avaient la sagesse de dire que justement les voyages formaient la jeunesse, et comme il n’y a que des gens extrêmement jeunes dans cette salle, tout le monde a clairement en tête ce que je veux dire.
Rencontrer les Français qui vivent à l’étranger, qui créent des richesses à l’étranger, qui représentent la France à l’étranger, même lorsque ce n’est pas leur métier, c’est toujours enrichissant, important, et c’est toujours précieux de retisser ce lien entre ceux qui, momentanément, sont en charge des affaires de la Nation, et ceux qui, durablement, son la Nation.
Enfin, la dernière raison pour laquelle je suis heureux d’être ici c’est parce que nous sommes aujourd’hui, plus exactement ce soir, à Dubaï, tout à l’heure à Abu-Dhabi, et donc pour quelques heures encore aux Emirats arabes unis. Vous le savez, la relation qui s’est tissée entre la France et les Emirats arabes unis est une relation particulière, riche, évolutive et, si je puis dire, évolutive dans le bon sens. Nous avons su créer- les Emiriens et nous – une relation, d’une nature presque unique, qui repose sur trois piliers, sur lesquels je voudrais dire quelque chose.
Le premier pilier de cette coopération, celui qui apparaît avec la force de l’évidence aujourd’hui, et à l’heure où je vous parle, depuis cette tribune, c’est évidemment le pilier de sécurité et de défense. Nous étions, avec Madame la Ministre, avec d’autres, aujourd’hui sur la base aérienne 104 d’Al Dhafra, nous avons vu des détachements de toutes les armées françaises, installés, investis, dans le cadre d’accords de coopération, d’accords de défense, dans le cadre d’opérations essentielles pour la sécurité de nos alliés, et la nôtre. Nous avons vu la place particulière qu’a pris, dans le dispositif français, cette base, voulue par l’un des prédécesseurs de l’actuel Président de la République, en l’occurrence Nicolas SARKOZY, qui a marqué l’organisation, d’une certaine façon, de notre défense et notre relation avec les Emirats arabes unis.
Je veux, j’ai déjà commencé à le faire, saluer l’engagement de nos soldats, saluer la qualité de la coopération avec nos alliés, dire combien s’enraciner, je ne sais pas s’il faut utiliser ce terme, en tout cas s’inscrire durablement dans cette relation est utile pour nous, et pas simplement ici. Vous savez que la France participe, au Sahel, à des opérations militaires indispensables pour garantir sa sécurité, eh bien le fait que les Emirats arabes unis participent financièrement à cette opération est l’illustration de l’intérêt commun en matière de sécurité et de défense que nous sommes en train de cultiver avec les Emirats arabes unis. C’est dans notre intérêt, c’est dans leur intérêt, c’est évidemment essentiel.
Le deuxième pilier de notre coopération c’est le pilier économique. Alors, il y a en la matière une certaine forme de continuité, parce que quand j’ai préparé ce déplacement, j’ai demandé à ce qu’on me sorte tout ce qu’avait dit tous les Présidents de la République et tous les Premiers ministres depuis le 2 décembre 1971, sur les Emirats arabes unis, et je vous rassure, je n’ai pas tout lu, mais j’ai des conseillers extrêmement efficaces.
La première rencontre de haut niveau a eu lieu en 1972 entre le Cheikh Khalifa et mon lointain prédécesseur Pierre MESSMER. Depuis 1972 il est fascinant de constater qu’avec des phases d’accélération, parfois des phases d’accélération plus relatives, il y a une très grande continuité. J’ai trouvé une déclaration fascinante, que j’aurais pu vous lire, mais je ne l’ai pas notée, mais elle existe, de 1975, du Président Valéry GISCARD d’ESTAING, dont chaque mot pourrait être utilisé aujourd’hui pour décrire, non pas l’objectif de notre relation avec les Emirats arabes unis, mais la réalité actuelle de notre relation avec ce pays.
Ça veut dire qu’en la matière, et quoi qu’on puisse en penser, nous avons fait la démonstration d’une volonté continue, et d’une volonté qui paye : la présence extrêmement importante d’entreprises françaises ici, les engagements, récemment confirmés par les autorités des Emirats arabes unis, relatifs aux investissements et à l’accompagnement financier d’investissements qui peuvent être faits en France le montrent. La force même de la communauté française ici – je parle sous le contrôle de Monsieur l’ambassadeur – 25.000 Français à Dubaï, 35.000 Français aux Emirats arabes unis, plus d’un Français qui naît tous les jours ici, deux parfois même, me dit-on, c’est quand même la preuve d’une vitalité exceptionnelle. Mais vous pouvez faire mieux. Enfin, pas maintenant !
Cette communauté française, imposante par son nombre, qui croît rapidement, elle est évidemment une force. Et j’entends parfois dire, tous ceux qui partent de France ce serait parce que ils pensent qu’ils peuvent réussir ailleurs, peut-être, et alors ? Mais tous ceux qui réussissent ailleurs, ils comptent pour la France, ils sont autant de relais, autant d’émetteurs de ce que nous sommes véritablement. Et de ce point de vue-là, Mesdames et Messieurs, vous avez tous un rôle à jouer. Si nous voulons faire en sorte que notre pays soit plus fort demain, qu’il se transforme – j’en dirai un mot – vous avez un rôle à jouer pour présenter ce qu’est la réalité de la France, pour présenter quels sont ses avantages, ses intérêts, ses opportunités, ses atouts.
Troisième pilier, le pilier culturel. Avant la base aérienne 104 nous étions, ce matin, au Louvre d’Abu-Dhabi. Incroyable d’abord par son architecture, bien entendu, mais au-delà même de cette architecture exceptionnelle, incroyable par l’ambition culturelle du projet, et incroyable par la capacité qu’ont eu nos deux Etats à mettre en avant une vision partagée.
Cette présence muséographique qui est déjà un atout, qui peut devenir encore plus fort, et dont j’espère qu’il deviendra un atout encore plus fort dans les mois qui viennent et dans les années qui viennent, constitue à l’évidence une particularité qu’il faut chérir et qu’il faut développer. Parce que derrière ce partenariat culturel, derrière cette volonté partagée de mettre en avant ce qui est universel dans nos cultures, la culture de ce pays, la culture de notre pays, il y a un pari que nous pouvons relever ensemble, un pari pour notre sécurité, un pari pour les valeurs auxquelles nous croyons, il n’y a rien d’anecdotique dans ce Louvre d’Abu-Dhabi, il n’a rien d’accessoire, il est essentiel. S’il était tout seul, s’il ne venait pas compléter un volet sécurité, et un volet économique, peut-être pourrait-on dire qu’il est accessoire, mais il est essentiel parce que justement il vient compléter une présence en matière de sécurité et une présence importante en matière économique.
Ces trois piliers, ils sont complémentaires, ils sont solides, et ils nous permettent de construire et de bâtir. Et c’est votre rôle, c’est aussi le rôle du Gouvernement que d’aider à ce que ces piliers permettent une construction encore plus belle, mais je voulais vous dire combien, avec le Gouvernement, sous l’autorité du Président de la République, nous sommes déterminés à saisir toutes les opportunités pour que la France et les Emirats arabes unis travaillent toujours mieux ensemble, et pour que les Français, qui veulent se développer, qui veulent réussir, puissent, ici aussi, trouver les opportunités qu’ils recherchent.
Et puis Mesdames et Messieurs, je voudrais vous parler de la France, de notre pays, parce que vous l’aimez, et parce qu’il se transforme. J’ai souvent l’occasion de dire que l’ambition de ce Gouvernement c’est de réparer le pays, alors j’ai bien conscience que cela peut paraître un peu excessif, qui sait, peut-être vaniteux, mais c’est très profondément ce que je crois, c’est très profondément ce qui anime le Gouvernement, et je crois que c’est très profondément ce qui anime le Président de la République.
Je ne crois pas que nous voulions changer notre pays. Il est grand, il est beau, il a parfois ses inconvénients, il a parfois des moments qu’on aime moins, bien entendu, il faut les regarder en face, mais c’est un grand pays. L’objectif ce n’est pas de le changer, l’objectif c’est, point par point, de réparer ce qui ne fonctionne pas ou ce qui ne fonctionne plus.
Et ce que j’observe c’est que, depuis 8 mois, la perception de notre pays a changé, je pense que chacun ici l’observe, je pense que lorsque j’aurai terminé ce long discours, et que nous échangerons quelques mots, un très grand nombre d’entre vous me dira « ah, ça change un peu, on sent que la perception est en train de changer. » Eh bien il faut utiliser ce changement de perception, qui s’appuie sur des transformations que nous avons engagées, pour accélérer ces transformations.
Il y a évidemment un rôle essentiel du Président de la République dans le changement de cette perception, par sa jeunesse, par l’incroyable recomposition politique qu’il a permis après l’élection présidentielle avec les élections législatives, et puis par la présence qu’il a su incarner sur la scène internationale, en Europe, mais au-delà.
Et puis il faut, s’appuyant sur cette présence, utilisant cette énergie, effectivement réparer le pays là où il pèche, plus exactement là où il doit être réparé. C’est ce qu’a entrepris le Gouvernement, dès sa nomination, avec beaucoup d’ardeur et beaucoup de confiance, en transformant son droit du travail pour faire en sorte qu’il soit plus adapté aux réalités des petites et des moyennes entreprises, en faisant en sorte de donner la souplesse nécessaire pour être compétitif, en transformant la fiscalité pour baisser les prélèvements obligatoires dans le temps. Pour faire en sorte que la fiscalité du capital soit plus simple et plus lisible, pour faire en sorte que les dispositions fiscales soient plus stables, car nous savons tous ici que le niveau des prélèvements obligatoires peut-être un problème, mais que l’instabilité des prélèvements obligatoires est systématiquement un problème. Pour faire en sorte que notre pays soit plus attractif aux investisseurs étrangers, et il y avait du travail, et ce pari, incarné par la réunion organisée par le président de la République au Château de Versailles il y a quelques semaines, juste avant Davos, ce pari est en passe d’être gagné, d’être relevé.
L’objectif pour nous maintenant c’est d’élever le niveau de compétences de notre Nation, non pas du tout qu’il serait insatisfaisant. On forme souvent remarquablement bien la force de travail en France, on reconnaît partout dans le monde la qualité des ingénieurs, des techniciens, des juristes, parfois, plus souvent des ingénieurs que des juristes d’ailleurs, c’est un juriste qui vous le dit. Mais la plus grande sécurité que nous pourrons offrir à nos concitoyens, la plus grande et la plus efficace arme qu’on pourra fournir contre le chômage, l’essentiel de notre compétitivité à l’international, ce sera les compétences de nos concitoyens.
C’est la raison pour laquelle, depuis le plus jeune âge, avec la réforme du CP et du CE1, jusqu’à la réforme du bac, jusqu’à la transformation de l’entrée dans l’université, jusqu’à la réforme de l’apprentissage, nous voulons prendre le problème par tous les bouts pour faire en sorte que notre Nation soit plus intelligente. Là aussi c’est peut-être curieux de dire les choses aussi crûment, elle l’est déjà beaucoup, mais elle peut l’être encore plus, et il est certain que c’est comme ça que nous saurons relever la compétition internationale, relever ce défi de la compétition internationale.
Enfin, dernier sujet important, nous voulons faire en sorte de préparer l’avenir. Qu’est-ce que ça veut dire préparer l’avenir ? Ça veut dire essayer de faire en sorte d’assainir nos finances publiques, et je ne vous cache pas que là aussi il y a du travail. Ça veut dire consentir des dépenses publiques, parce que certaines sont essentielles, pour être à même de faire face aux défis de demain, les transitions et écologique bien entendu, l’insécurité de ce monde.
Madame la ministre des Armées a présenté à cette semaine une Loi de programmation militaire qui traduit un effort jamais vu en matière de dépenses publiques pour la défense et pour les armées. Chaque année ce seront 2 milliards de plus qui seront consacrés aux dépenses militaires. Au total, jusqu’à 2023, ce sera près de 200 milliards de dépenses publiques pour la défense, pas pour le plaisir de satisfaire les demandes qui sont parfois formulées par les militaires, Amiral, pas du tout, mais parce que notre monde exige que nous soyons prêts, et préparer l’avenir c’est aussi préparer sa sécurité. Dans tous les domaines régaliens – l’intérieur, la justice, la défense – nous devons accroître notre effort, et en même temps nous devons respecter l’équilibre de nos finances publiques et assainir nos finances publiques.
Mesdames et Messieurs, la France se transforme, l’Europe change, nous devons jouer tout notre rôle, nous avons un rôle à jouer, nous pouvons le jouer, il nous appartient d’être à la hauteur des événements, à la hauteur des enjeux, il nous appartient de croire en notre pays. Le Président de la République dit parfois que la France est de retour, il a raison.
Vive la République, Vive la France.
Discours à l’occasion de la rencontre avec la communauté française à Dubaï