Il est rare pour ne pas dire exceptionnel qu’une décision du CE provoque une telle avalanche de commentaires et autant de colère. Encore faut-il le lire et rappeler les faits. Le lire, c’est assez facile! Résumons nous. Saisi par Reporter Sans Frontières à propos de Cnews qui ne respecterait pas les règles du pluralisme exigées à tout média télévisé auquel l’Etat a accordé un accès sur les ondes, le CE exige donc de l’ARCOM (ex-CSA) ou police de l’audiovisuel, dans les 6 mois de prendre des mesures pour assurer la pluralité des opinions, non seulement au niveau du temps de parole des responsables politiques invités, ce qui était déjà le cas en principe, mais aussi de l’ensemble des intervenants sur cette chaîne: animateurs, experts, invités divers, etc. Cette nouvelle jurisprudence, de ce que je comprends, contrairement à ce que disent nombre de commentaires, ne concerne pas seulement Cnews, mais, au-delà du cas d’espèce, toutes les chaînes de télévision, privées comme publiques. Elle soulève une question de liberté mais aussi de cohérence et de réalisme. D’une part, elle prive les rédactions de leur liberté de choisir librement leurs intervenants. Encore que, notamment sur les chaînes de télé et radio publiques, surtout, une meilleure pluralité des opinions exprimées ne serait pas un luxe… Mais surtout, et c’est ce qui me frappe le plus, elle suppose la mise en place d’une usine à gaz où chaque personne intervenant sur les ondes serait fichée pour ses opinions. Elle revient à nier qu’un intellectuel puisse avoir une opinion purement fondée sur la réflexion intelligente et sans parti pris. (Il est vrai qu’à la télévision, c’est plutôt rare). Au prix d’une sorte de Gosplan, il faudrait que sur chaque sujet, chaque thème en débat, étiqueter les invités pour leur opinion sur ce thème et s’assurer d’un partage équitable du temps de parole. Et aussi, instaurer un contrôle bureaucratique de cette nouvelle règle. Les politiciens au pouvoir depuis quelques décennies ont favorisé le nivellement et la médiocrité dans le recrutement de la haute fonction publique. Nous en payons le prix. [J’ajoute un point de vue personnel: la mode des débats sur les chaînes de télé en continue, avec toujours les mêmes intervenants grimés en experts ou en chiens savants avec leurs clichés qui tournent en boucle, n’est pas vraiment ma tasse de thé. Mais c’est un autre sujet.]
MT