Notre époque politique vit sur une effroyable contradiction. La démocratie, le pouvoir du peuple, est universellement reconnue comme le seul mode de gouvernement acceptable. Pourtant, jamais le peuple, les gens, les citoyens, n’ont été autant méprisés sinon ridiculisés. Après la victoire du non au référendum grec de dimanche dernier à près de 61%, M. Tsipras semble aujourd’hui s’aligner sur les exigences des créanciers de la Grèce, prenant le contre pied du résultat d’une consultation qu’il a lui-même organisée. Un tel niveau d’incohérence et d’inconséquence a-t-il jamais été atteint dans l’histoire du monde moderne? Il s’est pourtant trouvé des politiques ou intellectuels français pour le comparer au général de Gaulle… Dans un entretien pour lequel le site Atlantico m’avait sollicité, j’ai tenté d’expliquer pourquoi cette comparaison me semblait totalement déplacée. Par ailleurs, plus le temps passe et plus je constate le basculement de l’ensemble européen dans un chaos invraisemblable, marqué par une suprématie précaire et fragile mais spectaculaire de l’Allemagne, la sortie de fait du Royaume-Uni, l’effacement de la France, la résurgence, de tous côtés, des angoisses populaires, passions haineuses et violentes, des chimères et des mirages. Les fondements de l’Europe moderne me paraissent en voie de s’effondrer: le respect des peuples, sur un pied d’égalité, des citoyens, de la démocratie, l’amitié entre les nations qui la composent. Il nous semble que les dirigeants politiques ne sont absolument pas à la hauteur. Les mises en cause directe de la Grèce sont contraires à tous les principes non seulement de l’Europe, mais de la société internationale. Ces basculements quotidiens de la crise paroxystique à l’euphorie générale et inversement, dans une logique de spirale sans fin, sont le signe d’une perte généralisée des repères, d’une grave dépression voire d’une sorte de démence collective. Les haines nationalistes de la pire espèce se réveillent dans ce climat de fin du monde. Tout cela ne peut que mal finir, évidemment. C’est ce que j’ai écrit dans cette tribune pour Figaro Vox.
Maxime TANDONNET