Texte complet de l’entretien avec M. Jean Petaux ci-joint.
Alors que la droite sénatoriale s’assure de la bonne marche de la réforme des retraites à la Chambre haute, votant mardi soir avec le gouvernement l’article sept, les partis de gauche et les syndicats sont descendus dans la rue et ont engagé une grève reconductible, qui ne semble pas être en mesure de faire reculer le gouvernement. Qui des parties en présence s’en sort le moins mal pour l’instant dans cette bataille rangée ?
Il faut dire que cette séquence est un fiasco pour l’ensemble de la classe politique française. Elle donne une image épouvantable de la vie publique nationale. La mesure phare des 64 ans est immensément impopulaire : selon de nombreux sondages concordants, elle est rejetée par les trois quarts des Français et les quatre cinquièmes des travailleurs. Mais la classe politique dans son ensemble donne le sentiment de n’en tenir aucun compte. Elle s’enfonce dans une attitude qui manifeste une sorte de mépris du peuple et de déconnexion. Pire : sur le fond, c’est le peuple qui a raison. Les 64 ans ne servent strictement à rien compte tenu de la règle des 43 annuités. Leur unique effet sera d’obliger à travailler plus de 43 ans quelques catégories de travailleurs ayant fait peu d’études (et non concernés par les dérogations prévues pour les carrières longues). Le reproche d’inutilité et d’injustice est avéré. Mais la majorité et ses alliés s’acharnent à tenir bon dans leur bras de fer contre le peuple. Qui s’en sort le moins mal ? Sans doute les opposants à cette mesure mais sans pour autant qu’ils échappent entièrement à la profonde aversion envers la classe politique qui risque de résulter de cette catastrophe.
Faute d’une majorité de français en accord sur autre chose que le refus de cette réforme des retraites ou d’un projet alternatif établi, plus largement d’une structuration politique, est-ce le technocratisme macroniste qui finira par surnager ? Avec quelles conséquences ?
Il me semble qu’on pouvait le penser avant cette séquence. On pouvait croire que le macronisme, allié à une partie de LR l’emporterait en 2027 avec un autre candidat que M. Macron qui ne peut se représenter, comme une troisième force contre les dits « extrêmes » Nupes et RN. Maintenant, ce scénario me semble de moins en moins probable. Le macronisme après cette réforme, tout comme la majorité des leaders de LR, va plus que jamais incarner une classe dirigeante obtuse, déconnectée, en conflit avec la France populaire. Au vu de ses signes de faiblesses à l’Assemblée (larmes de Mme Berger, bras d’honneur de M. Dupont-Moretti) on sent bien qu’il est au bord du naufrage. Bien sûr après cette séquence, M. Macron va prendre des initiatives emblématiques et surenchérir dans la communication pour donner l’impression d’un coup de barre à gauche. Mais qui pourra y croire ? Il faut admettre que nous entrons dans une période de chaos politique total, le paroxysme de la décomposition dont on parle depuis longtemps. Personne ne peut prédire ce qu’il en sortira. Pour ma part, je place une vague espérance dans les quelques frondeurs de la droite LR autour desquels pourrait se reconstruire quelque chose. Mais ce n’est pas gagné…
MT