La déclaration du président Macron devant la conférence internationale de soutien à l’Ukraine ne relève sans doute pas de l’improvisation ou d’une maladresse. Certes elle s’explique essentiellement par l’hubris de son auteur. Mais pour autant, elle marque bel et bien un tournant dans l’approche française du conflit. Le discours officiel, jusqu’à présent, consistait à marteler que la France n’était pas en guerre avec la Russie. Quels que soient les rétropédalages et explications des courtisans, l’envoi de l’armée française ou d’une coalition de l’OTAN en Ukraine marquerait une indéniable entrée en guerre avec participation active aux hostilités et le commencement d’un engrenage. L’idée sous-jacente à ce tournant tient dans l’analogie avec la fin des années 1930. La Russie, comme l’Allemagne hitlérienne, menacerait l’Europe occidentale d’une attaque. Dès lors, l’aide militaire à l’Ukraine se révélant insuffisante pour en venir à bout (ce qui était une évidence dès le départ sauf pour les crétins qui dirigent l’Occident), il faudrait envisager de passer à l’étape supérieure: l’envoi de troupe. Or, cette analyse est fausse ou mensongère. La Russie, isolée, n’a absolument pas le projet (suicidaire) ni surtout les moyens de s’attaquer à l’Europe au-delà de l’Ukraine. Et tout part de ce mensonge, ou de cette stupidité. Comparer la Russie actuelle qui piétine depuis deux ans face à l’Ukraine, 50ème puissance mondiale avant la guerre (probablement beaucoup moins aujourd’hui), exsangue, ayant perdu 1/3 de sa population en quelques années, à l’armée hitlérienne qui a écrasé l’armée française (prétendument la première au monde) en 10 jours, invincible jusqu’à Moscou (décembre 1941), relève de l’aberration et de l’inculture historique, ou juste de la bêtise. Les pourfendeurs de « Munich » sont des fanfarons ou des imbéciles. A chaque conflit (Indochine, Suez, Algérie, Vietnam, Afghanistan, Irak (2003), etc. c’est toujours le même refrain. Les fanfarons traitent les partisans de la paix de « munichois » – mais les mêmes fanfarons, avec le sang des autres, sont bien souvent les premiers à se planquer ou planquer leurs enfants face à un risque pour eux-mêmes. Alors évidemment, après les débâcles irakienne et afghane, un nouveau revers de l’Occident dans le conflit Russie-Ukraine (c’est-à-dire une solution de paix sans défaite russe avérée) serait une humiliation supplémentaire. Mais c’est une autre question. A la suite de cette déclaration, la plupart des pays occidentaux se sont ouvertement désolidarisés de la déclaration présidentielle (USA, RU, Allemagne, Italie, Pologne, etc.). Ils ont affirmé clairement, en réaction aux propos du président français qu’ils n’enverraient jamais de troupes en Ukraine quoi qu’il arrive. Un joli cadeau, finalement, et encouragement, au despote de Moscou qui n’en demandait pas tant…
MT