Composé de trente courts chapitres sous forme de questions/réponses, La révolution française vérités et légendes est un ouvrage à la fois savant et didactique, d’une lecture agréable et facile, dont l’objectif est de faire la lumière sur le véritable bilan de la révolution, par-delà les passions et les idéologies. Ce livre est particulièrement riche de rappels et aussi de révélations par l’un des historiens spécialistes de cette période qui pose un regard impartial sur l’un des événements constitutifs de la Nation moderne.
Il répond à des questions familières à toute personne qui s’intéresse à l’histoire: La révolution était-elle inévitable? Est-elle la fille de Lumières? Louis XVI a-t-il joué un double-jeu? Etait-il coupable? Girondins et Montagnards se sont-ils livrés une lutte à mort? La Terreur a-t-elle sauvé la république? La Vendée a-t-elle été victime d’un génocide? Danton a-t-il voulu mettre fin à la Terreur? La révolution a-t-elle fondé la démocratie? A-t-elle développé l’éducation? Grâce à sa parfaite maîtrise du sujet, l’auteur pourfend de nombreuses idées reçues.
Il présente la révolution comme un processus complexe ou s’expriment le meilleur comme le pire de l’humanité. Certes, fille des Lumières, la révolution naquit surtout, selon lui, de la profusion au Palais Royal de pamphlets brutaux et salaces, sans rapport avec la philosophie, qui engendrèrent un climat propice à la violence. Oui, dit-il, Louis XVI a bien joué un double-jeu, entretenant une correspondance secrète avec les monarchies européennes dont il attendait un secours. Il montre aussi, contrairement à une croyance répandue, que Girondins et Montagnards étaient le plus souvent d’accord sur l’essentiel, mais se déchiraient sur des logiques de pouvoir.
Au chapitre des idées reçues, il montre que l’opposition traditionnelle entre le modéré Danton et le fanatique Robespierre relève en partie de la légende – le premier vota lui aussi la mort du roi et fit décréter la création du tribunal révolutionnaire le 10 mars 1793. Quant a la Terreur, l’auteur y voit, non pas une nécessité liée à la sauvegarde de la république (dont les armées étaient victorieuses au dedans comme au dehors quand elle s’est déchaînée) mais la conséquence d’une « dynamique de tout processus révolutionnaire voué à la création d’un monde nouveau sur les ruines d’un monde ancien« . L’auteur souligne, en citant de multiples documents, que la Vendée fut bel et bien victime d’une volonté d’extermination incluant les femmes, les enfants et les vieillards, par les colonnes infernales soit environ 200 000 morts.
Il nuance l’idée que la révolution a été faite par le peuple et qu’elle a inventé la démocratie, rappelle que la première élection au suffrage universel en France, celle de la Convention en septembre 1792, donna lieu à un niveau de participation de 10%! (700 000 électeurs pour un corps électoral de 7 millions de personnes). Il rappelle que ce peuple – les milieux populaires – représenta 90% des victimes de la Terreur (contre 10% le clergé et l’aristocratie).
Pour autant, cet ouvrage est loin de se présenter comme un pamphlet antirévolutionnaire dès lors que, sans rien dissimuler des atrocités commises, il rend hommage à l’œuvre accomplie dans certains domaines: la lutte contre la pauvreté, l’émancipation des femmes, des Juifs, des esclaves, et aussi son action en matière d’éducation: « Le 19 décembre 1793, fut votée la première véritable loi scolaire à l’initiative du député Bouquier… instaurant une instruction à la fois gratuite et obligatoire pour les garçons et les filles d’au moins six ans, assurée pendant au moins trois années consécutives par des instituteurs et institutrices rétribués par l’Etat. » Un beau livre pour ceux qui connaissent mal cette période, animés par la curiosité historique mais aussi pour les connaisseurs qui y apprendront beaucoup.
MT