Le second tour des régionales bouleverse le paysage politique (pour Figaro Vox)

Rien n’y a fait. Les multiples appels exhortant les Français à se rendre aux urnes pour le deuxième tour des régionales et des cantonales sont tombés dans le vide. L’alerte lancée par M. Jean Castex, le Premier Ministre « Faire gagner l’abstention, c’est faire perdre la démocratie » n’a pas été entendue. Les « Vingt bonnes raisons d’aller voter » du journal Libération n’ont pas davantage convaincu les Français…

Au lendemain du premier tour, les commentateurs ont généralement attribué ce taux d’abstention record à la défiance des Français envers la politique de plus en plus perçue comme déconnectée de leur vie quotidienne. « Voter ne sert à rien » fut le cri de cœur de nombreux Français répercuté dans les médias. Le second tour des régionales, avec un taux d’abstentionnisme presque aussi élevé qu’au premier tour (65%), malgré les multiples appels au civisme et les mises en garde, n’a fait que confirmer cette situation.

Dans ce contexte, à l’issue d’un 1er tour des régionales marqué par l’effondrement du parti présidentiel (LREM), et le net recul du Rassemblement national, la plupart des observateurs de la politique française avait estimé que le résultat des régionales ne remettait pas fondamentalement en cause l’équilibre des forces en vue des futurs grands scrutins nationaux de 2022. Un sondage Harris Interactive (Challenges) du 23 juin, au lendemain du 1er tour confirmait d’ailleurs la poursuite de l’écrasante domination du tandem le Pen/Macron aux présidentielles et la certitude sondagière de la réélection de ce dernier avec 54% des voix contre Mme le Pen.

Selon cette vision largement partagée, rien ne s’était donc passé aux régionales. Neutralisée par l’abstentionnisme massif, elles se présentaient comme une simple parenthèse dans la routine politique française. Elles n’avaient même pas écorné sa glaciation depuis quatre ans.  « Entre les régionales et les présidentielles, on parle de deux corps électoraux différents » constate justement Jérôme Sainte-Marie dans le Point.  De fait, l’omniprésence médiatique quotidienne du chef de l’Etat et la surexposition de Mme le Pen (prouvée par une étude intitulée « projet Arcadie »), semblaient avoir préservé, même au lendemain du 1er tour des régionales, leur tandem dominant les sondages en vue des présidentielles.

En vérité, il se pourrait que ces élections régionales, notamment les résultats du second tour aient bien davantage ébranlé l’équilibre politique du pays dans ses profondeurs qu’il ne paraît. L’échec du RN, sa spectaculaire défaite en PACA et son recul partout semble consacrer une fois pour toute l’impossibilité pour ce parti isolé, sans alliance possible et toujours largement diabolisé, d’accéder au pouvoir. Cet échec pourrait ainsi fragiliser l’image de Mme le Pen comme principale opposante à M. Macron. 

Quant au président de la République, la faillite de son parti souligne que malgré des sondages de popularité légèrement meilleurs que ceux de ses deux prédécesseurs, son image est sérieusement dégradée dans l’électorat et dans la France profonde. L’argument selon lequel l’abstentionnisme touche les catégories qui le soutiennent – les jeunes – ne résiste pas à l’analyse : les jeunes, justement, ne se sont pas déplacés pour le soutenir. Le triomphe de l’abstentionnisme est avant tout un échec pour le pouvoir en place qui n’a pas réussi à mobiliser ni à motiver les électeurs. La classe dirigeante française ne cesse d’offrir le spectacle d’une politique réduite à l’esbroufe, à des provocations et à des coups de communication. En donnant cette image de spectacle vaniteux destiné à la préservation des maroquins et tournant le dos au bien commun des Français, elle a préparé le terrain de l’effondrement démocratique.

Ce résultat du second tour pourrait donc sérieusement affaiblir le tandem sondagier dominant des futures présidentielles le Pen/Macron. Aujourd’hui, les présidents de régions de droite, larges vainqueurs dans les Hauts-de-France, l’Ile-de-France et Rhône-Alpes, ont le vent en poupe. Il leur reste à confirmer leur succès en trouvant les mots pour parler à l’immense majorité des abstentionnistes et surtout, à éviter de tout gâcher en retombant dans le fléau de la guerre des chefs.

Maxime TANDONNET

Author: Redaction