Macronisme et avenir de la droite (pour Atlantico)

  1. Que révèle sa définition de la droite telle que présentée dans Le Parisien aujourd’hui ? Où marque-t-il des points ?

M. Darmanin (s’exprimant en tant que responsable politique) déclare : « On supprime la taxe d’habitation, on baisse l’impôt sur le revenu, les impôts de production, on rétablit l’autorité de l’Etat, on lutte contre les drogues, on essaie de mettre fin au terrorisme islamiste, on met le mérite et le travail en priorité, on soutient les petits commerçants, on a fait des réformes difficiles, comme la fin du statut à la SNCF, la réforme de la haute fonction publique, on supprime l’ENA. Le président a une voix qui porte dans le monde. Les électeurs et les élus de droite s’en rendent compte. » De fait, il ne sera pas facile de convaincre les électeurs de droite que pendant l’actuel quinquennat les impôts dans l’ensemble (prélèvements obligatoires) ont baissé ; que la situation s’est améliorée en matière de drogue, de terrorisme islamiste et d’autorité de l’Etat et que la violence a reculé dans le pays ; que les petits commerçants sont soutenus – surtout depuis un an – , que la SNCF se porte mieux et que la haute fonction publique (voire l’administration française en général) est désormais sur la bonne voie grâce au sacrifice emblématique de l’ENA. Toutes les propagandes du monde n’y suffiraient sans doute pas.

2 Où pratique-t-il des raccourcis pratiques pour masquer le décalage entre  Emmanuel Macron et la droite ?

La question est de savoir si le modèle idéologique du macronisme et son bilan sont compatibles avec ce qu’attend l’électorat de droite. Cet électorat de droite se retrouve-t-il dans le discours de la table rase selon lequel il n’existe pas de culture française, la colonisation constitue un crime contre l’humanité, l’histoire de France doit être déconstruite ? La droite est-elle convertie à la « PMA sans père » remboursée par la sécurité sociale et l’interruption médicale de grossesse à neuf mois de grossesse pour « détresse psycho-sociale » ? Quant au bilan, il n’est pas évident que la droite puisse se satisfaire d’une dette publique qui est passée en quatre ans de 98 à 116% du PIB. Car ce sont nos enfants qui paieront par leurs impôts les conséquences de cette explosion de la dette. Cette vertigineuse augmentation de la dette qu’il faudra bien rembourser signe le caractère socialiste d’une politique. Dette covid-19, dira-t-on ? Une étude récente (Euler-Hermès) souligne que l’Allemagne aura remboursé la sienne dès 2028 alors que la France, avec son « quoi qu’il en coûte », mettra 67 ans à y parvenir… L’Allemagne aurait-elle moins bien géré pour autant la crise sanitaire ? Certainement pas : elle compte 1043 morts pour un million d’habitants contre 1635 pour la France…

  • Pourquoi plus personne n’est-il vraiment capable de donner une définition de ce qu’est la droite ?

La notion de droite a considérablement évolué dans l’histoire. La nation était jusqu’au XXe siècle une notion de gauche avant de basculer plutôt à droite au XXe siècle. Les notions de liberté ou de peuple aussi étaient des valeurs nettement de gauche alors qu’elles sont plutôt revendiquées par la droite aujourd’hui. La définition de la droite est donc relative, liée aux circonstances d’une époque et non pas absolue. Dès lors, c’est aux hommes de droite, par opposition à la gauche y compris au macronisme, de définir ce qu’ils veulent être aujourd’hui et ce qu’ils veulent faire. Parler d’autorité, de sécurité et d’immigration est certes important mais ne suffit absolument pas. Les hommes de droite devraient s’emparer du thème de la refondation de la démocratie française : après dix ans de hollando-macronisme qui n’ont cessé de s’enfoncer dans le mépris des « sans dents » aux « Gaulois réfractaires », comment replacer le peuple au centre du destin de la France ? Alors que l’Assemblée nationale est suspendue de fait par la soumission totale à l’Elysée, l’usage systématique des ordonnances et l’état d’urgence sanitaire, comment rétablir une démocratie parlementaire digne de ce nom et une authentique démocratie référendaire ? Et ainsi combattre la fracture démocratique et restaurer la confiance ? Tel est l’enjeu fondamental qui conditionne tous les autres.

4- Pourquoi tout est chamboulé ? Qu’est ce qui perturbe les clivages ? 

Il y a trois explications possibles. La première est la plus souvent mise en avant : à la lutte des classes entre la bourgeoisie et le prolétariat, la mondialisation a substituée une opposition entre élites mondialisées et « France périphérique » qui ne recouvre pas le clivage classique droite/gauche fondé sur la question sociale au XXe siècle. Une autre explication est sans doute  plus inquiétante mais sans être forcément exclusive de la première. Elle tient à la montée du nihilisme et l’affaiblissement des convictions. La politique en tant que service du bien commun est désormais largement vidée de sa substance. Elle devient avant tout une affaire d’idolâtrie, de calculs personnels à des fins d’intérêt matériel et bien plus, de vanité narcissique, d’obsession électoraliste. Dès lors, les clivages de fond s’effacent logiquement. Ce phénomène découle de l’ère du vide, de la société d’ultra-narcissisme annoncé par Gilles Lipovetsky en 1982 au détriment de l’engagement collectif pour un intérêt collectif. En outre, le déclin du niveau scolaire sur un demi-siècle, prouvé par toutes les études notamment en histoire et en français, a certainement affaibli les outils de l’esprit critique d’une nation dans sa globalité et favorisé ainsi le naufrage de la politique dans les jeux d’idoles, les polémiques, provocations, l’esbroufe, les coups de com’ et la posture.

Author: Redaction