Cet étrange couvre-feu

L’une des caractéristiques les plus sidérantes du cerveau humain est sa malléabilité. On s’habitue à tout, on finit par tout accepter et tout banaliser. Un couvre-feu est en vigueur depuis six mois et il est devenu une chose normale. A 21H les rues se vident, les gens prennent peur et rentrent chez eux. Evidemment, les conséquences et le contexte sont différents, pourtant ce couvre feu est en substance le même que le couvre-feu des années d’occupation 1940-1944. Selon les période, à 20 H ou à 23 H, les Français n’avaient plus le droit d’être dehors et devaient rentrer chez eux. Rien n’est plus étrange que la résurrection de ce phénomène aujourd’hui. Jamais un couvre-feu (le mot même comme la réalité), un couvre-feu général et durable, n’eût été possible dans l’après guerre. Aucun dirigeant politique n’eût assumé un retour au cauchemar. Il faut croire qu’à la troisième génération, le souvenir des années sombres s’estompe dangereusement. A l’évidence il ne sert strictement à rien sur le plan sanitaire. On sait que le la covid 19 ne s’attrape pas dehors. Obliger les Français à rentrer chez eux, au besoin à s’entasser à l’intérieur d’une pièce quand ils sont plusieurs, notamment les jeunes, est infiniment plus dangereux que de les laisser vivre à l’extérieur. Et le virus ne devient pas plus virulent en extérieur après 21H qu’avant. Tout ceci est une véritable insulte à l’intelligence. Pourquoi? Nous sommes toujours dans la logique de l’esbroufe: asservir pour faire semblant de protéger. Le prix de cette mystification est gigantesque: enfermer une nation après 21H comme après 23 H revient à anéantir les fondements d’une société de liberté. Peuple-enfant avec sa permission de 21H et la puissance publique, faute de rien maîtriser du tout, a la satisfaction de voir les rues et les terrasses se vider sous son joug. Or, il ne se trouve pas une voix chez les intellectuels ou les politiques, de l’extrême gauche à l’extrême droite incluses, pour s’interroger sur la nature de ce couvre-feu. Le plus extraordinaire, le plus tragique, la leçon la plus invraisemblable, c’est la facilité avec laquelle le grand troupeau se soumet, et pire, s’habitue.

Maxime TANDONNET

Author: Redaction