Dans son discours de Kigali, le chef de l’Etat français déclare: « La France a un rôle, une histoire, une responsabilité politique au Rwanda. Elle est restée de fait aux côtés d’un régime génocidaire mais n’a pas été complice [Elle a] une responsabilité accablante dans un engrenage qui a abouti au pire ». Entre responsabilité accablante et complicité, la nuance est faible. « Complice: qui participe à l’infraction commise par un autre (Robert) ». Comment peut-on rester aux côtés des tueurs pendant un génocide – le massacre d’un million d’hommes, femmes et enfants – sans être complice, même par passivité? Mais surtout, pourquoi noyer le poisson? On dit « la France » est responsable. Mais la France, c’est une histoire d’environ 1200 ans (traité de Verdun), une langue, une tradition littéraire et scientifique, un Etat et un peuple. Or, les décisions ont été prises par une infime poignée d’hommes autour d’un prédécesseur de l’actuel occupant de l’Elysée. Combien étaient-ils, 4 ou 5? Pourquoi ne pas les nommer? Pourquoi ne pas les juger s’ils ont une responsabilité accablante – accablante – dans un crime de masse? La France comme entité historique et aussi comme peuple n’est pas complice ni même responsable. Combien de Français de l’époque, des 60 millions de Français, avaient-ils la moindre conscience de ce qui se passait au cœur de l’Afrique en 1994? Connaissaient les noms Rwanda, Hutu et Tutsi? Pourquoi 60 millions de Français devraient-ils (à travers « la France ») assumer la responsabilité de 4 ou 5 hauts dirigeants et conseillers de l’ombre? Les Français, on ne leur demande jamais leur avis mais on les désigne du doigt pour assumer la responsabilité des actes commis par d’autres. Le président en dit trop ou pas assez: il serait plus juste de nommer ceux qui ont, selon ses termes, une « responsabilité accablante » dans ce génocide. Et ce devrait être à la cour pénale internationale de se prononcer sur leur complicité. La France responsable (dans son ensemble) en tant que France? Dénoncer la responsabilité accablante de la France en général – et payer – n’est-il pas une manière de protéger et de couvrir la poignée de responsables – d’un crime contre l’humanité, un vrai cette fois-ci – qui tirait les ficelles? Et quand commencera-t-on enfin à s’interroger sur la nature foncièrement débile d’un régime politique qui permet à un roitelet élyséen élu sous la pression médiatique et imbu de lui-même jusqu’à l’aveuglement de faire tout et n’importe quoi dans le dos de la nation?
Maxime TANDONNET